Malgré l’interdiction officielle du colorant E171 dans l’alimentation, le dioxyde de titane continue d’être détecté dans le lait maternel, animal et infantile. Cette persistance interroge sur les voies de contamination et les risques à long terme pour la santé des femmes et des nouveau-nés.
Classé cancérogène potentiel par inhalation, le dioxyde de titane (TiO₂) est encore massivement utilisé dans de nombreux produits du quotidien (cosmétiques, médicaments, peintures, plastiques…), bien que son usage dans l’alimentation ait été interdit en France depuis 2020 et dans l’Union européenne depuis 2022.
Des études récentes révèlent une contamination persistante de l’environnement : eaux de surface, nappes phréatiques, sols et même air ambiant, où les nanoparticules issues de l’activité industrielle, de l’érosion des bâtiments ou de produits ménagers se dispersent et s’accumulent.
Présence avérée dans le lait maternel, animal et infantile
Des analyses menées grâce à des techniques de pointe (spectrométrie au synchrotron SOLEIL et à l’hôpital Lariboisière) ont permis de détecter des nanoparticules de titane dans :
• 100 % des laits animaux analysés (toutes espèces, tous modes d’élevage confondus)
• 83 % des laits infantiles du commerce (du 1er au 3e âge, aussi bien conventionnels que bio)
• Tous les laits maternels de 10 femmes volontaires habitant la région parisienne, avec des taux variables selon l’individu
Les concentrations détectées sont parfois considérables, pouvant atteindre jusqu’à 3,9 milliards de particules par litre de lait infantile, et illustrent la capacité du dioxyde de titane à franchir la barrière de la glande mammaire et à exposer directement le nourrisson.
Implications sanitaires et interrogations pour le secteur périnatal
La présence de ce contaminant dans le lait remise en question l’idée que la naissance interrompt l’exposition aux nanoparticules, déjà observée pendant la grossesse (dépôts retrouvés dans le placenta). Les conséquences potentielles pour la santé des nouveau-nés et des femmes allaitantes restent encore mal connues, mais le caractère persistant, bioaccumulable et potentiellement toxique des nanoparticules de TiO₂ - en particulier pour le développement du système nerveux et endocrinien - suscite une vigilance accrue.
Perspectives d’action
Dans ce contexte, les professionnels disposent de plusieurs leviers d’action essentiels :
• Informer les patientes et familles sur la contamination environnementale et la nécessité de limiter l’exposition aux nanoparticules, tant alimentaires que domestiques.
• Recommander des pratiques de précaution (limitation des produits cosmétiques ou pharmaceutiques contenant du dioxyde de titane,…).
• Participer à la veille sanitaire.
• Sensibiliser les décideurs et institutions sur la nécessité de renforcer la régulation et la recherche sur les polluants émergents, au nom de la santé périnatale.
L'enjeu d’une vigilance collective
La détection quasi systématique du dioxyde de titane dans le lait interroge sur l’efficacité des interdictions actuelles et appelle à une mobilisation interdisciplinaire. Pour les professionnels se tenir informés et accompagner activement les patientes dans l’adoption de gestes protecteurs, c’est assumer pleinement un rôle de santé publique à l’ère des polluants « invisibles »