Les crises sanitaires et environnementales se succèdent depuis plus de 50 ans. Défaut d’anticipation? De prévention? Cet ouvrage, « Les crises sanitaires et environnementales : comment les éviter ? » apporte un éclairage sur différentes crises connues et propose d’apporter des solutions.
L’essor de l’industrialisation a fait émerger un impact délétère sur l’environnement et sur les populations. Des accidents tels que celui d’AZF à Toulouse, ou bien l’utilisation d’amiante ou de peinture à base de plomb – causant le saturnisme infantile - ont pollué l’environnement tout en causant des dégâts sur la santé humaine se perpétuant même, dans certains cas, sur plusieurs générations. Pourtant, l’existence de réglementation, la mise en place d’une cartographie des risques auraient pu prévenir certains accidents.
Une crise peut être la conséquence d’un manque préparation, au niveau mondial comme il en est question dans le livre à travers la crise sanitaire COVID 19. Les auteurs, Francelyne Marano, (biologiste et toxicologue environnemental et vice-présidente du comité d’expert Santé-environnement-travail de Santé Publique France) et Fabien Squinazi (biologiste et président de la commission spécialisée Risques liés à l’environnement du Haut Conseil de la santé publique) décortiquent les enchainements qui ont provoqué l’épidémie.
« Cette crise sanitaire nous a montré que, si la circulation de l’information a été aussi rapide que la circulation planétaire des dégâts du virus, il a existé un décalage temporel entre l’état de l’art scientifique et les déclarations de l’OMS qui se sont répercutées en France. Elle a révélé l’ampleur de la tâche à réaliser en temps contraint, pour établir des procédures sans tenir compte des plans antérieurs sur la préparation à une pandémie et avec des moyens de lutte limités, notamment par le manque de masques et d’équipements de protection, faute de stocks suffisants. Bien que le gouvernement s’appuyait en grande partie sur le comité scientifique Covid, mais aussi sur des conseils de défense sanitaire pour prendre des décisions de crise, de nouvelles voies d’information (réseaux sociaux) et la médiatisation d’experts autoproclamés ont sûrement pesé sur l’opinion.Elle a révélé aussi l’affleurement et l’amplification de la sphère complotiste, qui a surfé sur la crise en utilisant des biais cognitifs émotionnels et clivants. Enfin, elle a souligné l’importance de l’éducation, mais aussi du degré de confiance indispensable à une pratique des mesures de gestion. Dans son avis du 15 juin 2022, le HCSP a rappelé qu’« il convient désormais d’appliquer une stratégie de réduction des risques populationnelle afin de protéger les personnes à risque de forme grave de Covid-19 ». Les mesures barrières deviennent de nouvelles règles de vie, comme nous l’écrivions en décembre 2021 (Squinazi et Lepelletier, 2021)... »
Réagir en cas d'alerte sans céder à la préssion des industriels
Finalement, les alertes données avant la majorité des crises ont été inefficaces ou déficientes. Pourtant, « Des alertes sanitaires surviennent tous les jours et la question est de savoir si le système complexe de leur traitement mis en place depuis maintenant 20 ans est suffisamment efficace et performant pour les traiter rapidement et les hiérarchiser, sans céder aux pressions de tous bords. Il faut pouvoir les valider, surtout quand le signal est faible. Faut-il le prendre au sérieux, en particulier s’il est incertain ? L’expertise collective, incluant tous les partenaires, experts, professionnels et représentants de la société civile, est alors nécessaire. Il faut expliquer et communiquer, écouter les questionnements, ne pas les écarter quand ils
gênent ou qu’on les trouve sans fondement.».
Les auteurs rappellent d’ailleurs que les crises suivent toujours le même schéma. Un médecin, un chercheur donne l’alerte à partir de ses recherches, de ses observations. En face, les industriels, qui mettent en doute les paroles du scientifique et qui demandent encore plus de preuves, mais qui de toute manière ne peuvent suivre les recommandations du fait des difficultés d’application. Les associations d’usagers demandent des mesures de prévention. Mais les décideurs prennent souvent des « demi mesures », demandent d’autres études qui conduiront à différer la décision.
Au final une meilleure communication des données scientifiques, plus de transparence et une meilleure coopération des acteurs intervenant dans une crise, rétabliraient la confiance auprés des citoyens et permettraient une meilleure adéquation avec les préoccupations de la société.
Une lecture éclairante et qui se place au plein coeur des sujets d'actualité.