L’utilisation de l’aluminium comme adjuvant dans les vaccins destinés aux nourrissons suscite depuis plus d’un siècle des débats, mêlant inquiétudes liées à leur toxicité potentielle et leurs bénéfices avérés contre des maladies. Une récente étude danoise réalisée sur une cohorte exceptionnelle de plus d’un million d’enfants permet d’apporter un éclairage important sur ce sujet.
Vaccins à l’aluminium et santé des enfants : bilan d’une vaste étude danoise
Une équipe danoise a analysé les données de santé de 1 224 176 enfants nés au Danemark entre 1997 et 2018, dont plus de 99% ont reçu des vaccins contenant de l’aluminium. Ces enfants ont été suivis au moins jusqu’à 5 ans, avec certains suivis prolongés jusqu’à 8 ans. L’exposition cumulative à l’aluminium par les vaccins durant les deux premières années de vie variait selon les années et les protocoles, avec des doses allant de 0 à 4,5 mg.
Objectifs et méthodes
Les chercheurs ont cherché à déterminer si une exposition accrue à l’aluminium via la vaccination infantile augmentait le risque de développer l’une des 50 pathologies chroniques étudiées, réparties en trois groupes :
Maladies auto-immunes (ex. dermatologiques, endocriniennes, gastro-intestinales)
Affections atopiques et allergiques (ex. asthme, dermatite atopique, allergies diverses)
Troubles neurodéveloppementaux (ex. troubles du spectre autistique, trouble du déficit de l’attention avec hyperactivité)
L’étude a utilisé un cadre quasi-expérimental, s’appuyant sur les variations temporelles des doses d’aluminium administrées dans le programme vaccinal danois, ainsi que sur le recoupement des données nationales de vaccination et de santé. Les analyses ont été ajustées pour de nombreux facteurs potentiels de confusion, imposant notamment d’exclure les enfants présentant une pathologie avant 2 ans.
Résultats clés
Les résultats principaux montrent aucune augmentation statistiquement significative des risques associés aux doses cumulées d’aluminium :
Maladies auto-immunes : rapport de risque ajusté (RRa) = 0,98 (IC 95 % 0,94–1,02)
Maladies atopiques/allergiques (groupe combiné) : RRa = 0,99 (IC 95 % 0,98–1,01)
Troubles neurodéveloppementaux (groupe combiné) : RRa = 0,93 (IC 95 % 0,90–0,97)
Les risques observés sont donc globalement stables, voire légèrement en baisse, suggérant qu’une exposition à l’aluminium par les vaccins ne présente pas de danger notable dans les premières années de vie.
Ces tendances se confirment lors d’analyses complémentaires par sexe, cohortes de naissance et en excluant les enfants non vaccinés. L’extension du suivi à 8 ans n’a pas modifié ces conclusions.
Contexte et portée
L’aluminium est utilisé depuis plusieurs décennies comme adjuvant dans les vaccins non vivants afin de renforcer la réponse immunitaire. Ces vaccins protègent notamment contre des maladies graves telles que la diphtérie, le tétanos, la coqueluche, Haemophilus influenzae de type b et les infections à pneumocoque.
Malgré leur efficacité reconnue, des inquiétudes publiques ont persisté sur un potentiel lien entre cet adjuvant et des maladies auto-immunes, allergiques ou neurodéveloppementales. Ce travail danois, fondé sur un échantillon exceptionnellement large, apporte un éclairage scientifique important.
Limites et débats
L’étude comporte toutefois certaines limitations :
La durée de suivi reste courte pour certaines pathologies, notamment neurodéveloppementales, dont le diagnostic peut survenir plus tard.
La quasi-absence de groupe strictement non vacciné a empêché la comparaison directe entre exposés et non exposés.
Plusieurs experts ont souligné la possibilité de biais, notamment un biais de "santé du vaccinés", où les familles plus engagées dans la santé générale vaccinant plus souvent des enfants en meilleure santé, ce qui pourrait entraîner des biais dans les résultats en faveur d’un effet protecteur apparent.
Des erreurs ou évolutions dans les registres utilisés ainsi qu’une variabilité dans les doses vaccinales ajoutent à la complexité d’interprétation.
Ces débats soulignent l’importance d’une vigilance continue et de recherches prolongées.
Message aux parents
Cette étude renforce la confiance dans la sécurité des vaccins contenant des adjuvants à base d’aluminium lors des premières années de vie. Elle n’a pas mis en évidence de sur-risque de maladies auto-immunes, allergiques ou neurodéveloppementales.
Cette information constitue un soutien précieux aux professionnels de santé et aux familles, qui peuvent être rassurées sur l’innocuité de ces composantes vaccinales dans les protocoles en vigueur.
Cependant, il est essentiel que la surveillance scientifique continue et que le dialogue avec les familles demeure ouvert et transparent, pour mieux répondre aux inquiétudes et assurer la santé des enfants.
©Freepik