La HAS recommande le dépistage systématique du CMV chez toutes les femmes enceintes dont le statut sérologique est inconnu ou négatif. Cette décision, qui sera réévaluée après trois ans, marque un tournant majeur.
Le CMV : une infection silencieuse
Le cytomégalovirus (CMV) est un virus transmis par voie naturelle, soit verticalement de la mère à l’enfant, par voie transplacentaire, pendant l’accouchement ou en postpartum (notamment lors de l’allaitement), soit horizontalement par contact direct avec les liquides biologiques contaminés.
En France, près de la moitié des femmes en âge de procréer ont déjà été en contact avec le CMV, un taux qui peut grimper à 90 % dans certaines régions d’outre-mer. Dans 90 % des cas, l’infection passe inaperçue et n’entraîne aucune conséquence pour la mère ou le fœtus. Toutefois, une infection survenant en début de grossesse peut, dans de rares cas, provoquer des séquelles lourdes chez l’enfant à naître : surdité, troubles neurologiques, retard du développement ou paralysie. Cette infection congénitale est d'ailleurs la première cause d’atteintes neurologiques et auditives d’origine virale chez le nouveau-né.
Pourquoi un dépistage systématique maintenant ?
Jusqu’à récemment, le dépistage du CMV pendant la grossesse n’était pas recommandé à l’échelle nationale, faute de preuves suffisantes sur son bénéfice. Pourtant, dans la pratique, environ un tiers des femmes enceintes bénéficiaient déjà d’un dépistage, mais de façon inégale selon les territoires, générant des inégalités de prise en charge.
L’évolution des connaissances scientifiques et des attentes sociétales a conduit le ministère de la Santé à saisir la Haute Autorité de Santé (HAS) pour réévaluer la pertinence d’un dépistage généralisé. La HAS préconise désormais d’intégrer ce dépistage au premier trimestre de grossesse, pour toutes les femmes dont le statut immunitaire vis-à-vis du CMV est inconnu ou négatif. Cette mesure vise à mieux prévenir les séquelles graves chez le fœtus, en permettant une prise en charge adaptée et précoce.
Modalités du dépistage et prise en charge
Le dépistage repose sur une prise de sang, à la recherche des anticorps IgG et IgM, complétée par un test d’avidité pour distinguer une infection récente d’une ancienne. En cas de primo-infection, un traitement préventif par valaciclovir peut être proposé, associé à un suivi renforcé. À ce jour, ce traitement n’a pas montré de risque de malformations chez le fœtus, mais son efficacité sur la réduction des séquelles reste à confirmer, d’où la nécessité d’un suivi et de la collecte de nouvelles données dans les années à venir.
Un dispositif à réévaluer dans trois ans
La HAS insiste sur le caractère expérimental et évolutif de cette recommandation. Après trois ans de mise en place, le dépistage systématique fera l’objet d’une réévaluation, à la lumière des données recueillies : efficacité du dépistage, sécurité du traitement, impact sur la santé des enfants et organisation des soins. Cette démarche vise à garantir que la stratégie retenue bénéficie réellement aux femmes enceintes et à leurs enfants, tout en limitant les risques et les inégalités d’accès aux soins.
La recommandation de la HAS ouvre une nouvelle page dans la prévention des infections congénitales et les sages-femmes jouent un grand rôle entre information, dépistage et accompagnement.