Depuis plus de 20 ans, en France, les femmes non immunisées contre la toxoplasmose bénéficient d’un dépistage mensuel jusqu’à l’accouchement. Alors que ce dépistage est unique au monde, le Collège des Gynécologues et Obstétriciens Français a demandé à un groupe d’experts d’adapter le dépistage prénatal de la toxoplasmose aux bonnes pratiques internationales.
Un peu d’épidémiologie…
Au cours des 50 dernières années, la séroprévalence de la toxoplasmose a diminué chez les femmes enceintes si bien qu’en 2016, seules 31% des femmes enceintes présentaient une immunité contre la toxoplasmose lors de leur 1re visite du suivi de grossesse. Parallèlement, l’incidence de la séroconversion de la toxoplasmose a diminué de 70% sur ces 30 dernières années, probablement liée aux mesures préventives.
Près de 0,2% des femmes sont concernées par une séroconversion pendant la grossesse
Sur 1000 femmes séronégatives, on compte 2 à 2,5 séroconversions, soit 1000 à 1300 nouvelles infections par an, en France.
Le taux de transmission materno-fœtal est de 25 à 29%. Il augmente avec l’âge gestationnel : de 3% à 6,6% au 1er trimestre, de 61% à 71% au 3e trimestre. La France compte environ 200 cas de toxoplasmose congénitale par an. Près de 90% des cas sont asymptomatiques et plus de 9% symptomatiques à la naissance avec 67,5% de formes modérées (calcifications intracrâniennes, lésions rétiniennes) et 32,5% de formes sévères (formes disséminées, hydrocéphalie, lésion maculaire).
Dépister pour une prise en charge précoce
Le dépistage sérologique mensuel de la toxoplasmose permet de prendre en charge le plus tôt possible les cas de séroconversion, en pratiquant une IMG pour les formes sévères ou de mettre en place un traitement pour les formes modérées. Bien qu’il n’existe pas à ce jour de recommandation pour la pratique clinique, des experts français ont proposé des lignes directrices.
Devant une séroconversion, ils recommandent de débuter rapidement le traitement avec la spiramycine avant 14 semaines de gestation soit spiramycine ou pyriméthamine/sulfadiazine après 14 semaines (systématiquement pour les infections du 3e trimestre en l’absence d’amniocentèse).En cas de diagnostic anténatal, l’association pyriméthamine/sulfadiazine sera administrée jusqu’à l’accouchement.
Un dépistage à revoir ?
Un tel dépistage de la toxoplasmose congénitale chez les femmes enceintes est unique en France. Plusieurs sociétés savantes internationales ne le recommandent pas notamment pour des raisons économiques. Pourtant une récente étude médico-économique a montré que si ce dépistage est couteux, du fait de l’augmentation du nombre de femmes non immunisées contre la toxoplasmose, seules 800 femmes attrapent la maladie sur 767 000 naissances et 150 bébés sont atteints. Christine Binquet, épidémiologiste au CHU de Dijon expliquait alors que « Grâce à une modélisation prenant en compte les options possibles en termes de prise en charge à chaque étape, et l'utilisation de données provenant en grande partie de la cohorte des femmes enceintes et des enfants pris en charge et suivis sur le long cours à l'hôpital de la Croix Rousse-HCL, il a été possible de prouver que le programme était efficient, que ce soit à court terme, soit un an après la naissance des enfants, ou à plus long terme lorsque la majorité des séquelles de l'infection sont reconnues chez les sujets infectés».
En tout cas, Des experts du Collège des Gynécologues et Obstétriciens Français se prononcent en faveur du maintien de ce dépistage. A suivre…
Sources :
reseau-chu.org
lanouvellerepublique.fr
Toxoplasmosis screening during pregnancy in France: Opinion of an expert panel for the CNGOF - J Gynecol Obstet Hum Reprod 2020 May 16;101814
Maternal and Congenital Toxoplasmosis: Diagnosis and Treatment Recommendations of a French Multidisciplinary Working Group - Pathogens 2019 Feb 18;8(1):24