Avec des risques de fausses-couches, de mortinatalité et de petit poids de naissance, une étude publiée dans le BMJ pointe les méfaits de la consommation de café pendant la grossesse.
Le café est l’une des principales boissons contenant de la caféine et aussi la plus consommée dans le monde. Connu pour ses effets énergisants, les recommandations internationales à l’égard des femmes enceintes sont toutes en faveur d’une restriction de consommation de café (et autres boissons à base de caféine) pendant la grossesse. Celles du Royaume-Uni indiquent que les femmes peuvent consommer jusqu’à 200 mg de caféine par jour (environ 2 tasses de café), les conseils de l’INPES conseille de ne pas dépasser 3 tasses de café par jour. Cette boisson dont il peut être difficile de se passer avait déjà alerté la Food and Drug Administration en 1980 lorsque des chercheurs avaient mis en évidence des effets tératogènes liés à la consommation de café chez les rongeurs.
Alors y a-t-il vraiment un niveau de caféine inoffensif ?
Après avoir identifié 1261 articles portant sur le café et la grossesse, des chercheurs ont analysé un peu moins d’une cinquantaine de travaux comprenant des études observationnelles et des méta-analyses. Ils ont alors trouvé 6 types de complications liées au café pendant la grossesse dans ce travail paru dans le BMJ : la fausse-couche, la mortinaissance, le petit poids d’âge gestationnel, la naissance prématurée, la leucémie aiguë infantile, le surpoids et l’obésité infantile.
- Pour les fausses-couches, le risque global était estimé jusqu’à 36% (IC à 95% de 1,29 à 1,45). Le risque était lié à la dose et il était augmenté de 14% (IC à 95% de 1,10 à 1,19) dans une étude pour chaque augmentation de 100 mg de caféine consommée par jour pendant la grossesse et de 19% (IC à 95% de 1,16 à 1,23) dans une meta-analyse pour chaque augmentation de 150 mg.
- Pour les mortinaissances, le risque était augmenté chez les femmes consommant une forte quantité de caféine de deux fois (IC à 95% 1,23 à 4,41), trois fois (IC à 95% 1,5 à 5,9) voire cinq fois(IC à 95% 1,6 à 16.4) dans une autre étude et ce après ajustement pour les facteurs de confusion potentiels. Deux méta-analyses ont montré des associations significatives avec le risque de mortinaissance pour 100 mg de caféine par jour estimé dans une étude à 9% (IC à 95% 1,02 à 1,12) et dans l'autre de 19% (IC à 95% de 1,05 à 1,35).
- Le faible poids de naissance et le petit poids d’âge gestationnel, une méta-analyse a retrouvé une risque accru de 26%, une autre a rapporté un risque augmenté de 10% (IC à 95% 1,06 à 1,14 ) pour chaque apport supplémentaire de 100 mg de caféine. La plupart des études mettant évidence ce risque.
- Pour l’accouchement prématuré et la leucémie infantile, les conclusions des études sont plutôt mitigées.
- Dans la majorité des études, les chercheurs rapportent une association significative entre le surpoids et l’obésité infantile et la consommation de café pendant la grossesse. Une association dose-réponse a été rapportée dans une étude, quand la consommation de caféine était la plus élevée (≥ 150 mg de caféine par jour) connaissant un risque global accru d'obésité supérieur au double (OR 2,37; IC à 95% 1,24 à 4,52) à l'âge de 5 ans par rapport aux enfants de mères n'ayant pas consommé de caféine pendant la grossesse.
Les variables comme la masse corporelle, l'âge, les antécédents de grossesse, la consommation d'alcool et l'exposition aux polluants ont toutes été prises en compte dans ces résultats.
Faut-il supprimer le café pendant la grossesse ?
Cette analyse ne fait pas bonne presse à la boisson si bien que l’industrie du café a rejeté en bloc les conclusions de l'étude. Il est vrai que les résultats sont assez alarmistes et qu’ils risquent d’engendrer de l’anxiété chez les femmes enceintes. Pour autant, les sociétés savantes peuvent s’emparer de ces résultats pour mettre à jour les recommandations actuelles puisqu’aussi selon les estimations de Greenwood et al, les dommages liés à la caféine, en supposant un niveau maximum « sûr » de 200 mg par jour pour les femmes enceintes représenterait environ 350 000 issues de grossesse négatives par an aux États-Unis.