Les troubles psychiques concernent jusqu’à 20 % des femmes pendant la grossesse. Tout l’enjeu de la prescription est de peser la balance-bénéfice/risque pour maintenir la qualité de vie maternelle et limiter l’exposition du fœtus au stress. Un récent article expose l’intérêt et les limites de l’utilisation des psychotropes durant la période périnatale. En voici les principales lignes.
S’intéresser à la santé mentale maternelle est un fort enjeu de santé publique. Les troubles psychiques chez la future mère sont susceptibles d’altérer la santé de la mère, de l’enfant, la relation mère-enfant et d’entrainer des comportements de négligences et de maltraitance. Si la prescription de psychotropes chez la femme enceinte peut représenter un frein pour des professionnels, l’arrêt ou la diminution du traitement a été identifié par l’Enquête Nationale Confidentielle sur les Morts Maternelles comme facteur de risque de suicide maternel.
Les différentes classes de psychotropes
Les traitements antidépresseurs de première intention sont les ISRS en raison des faibles effets secondaires pendant la grossesse et l’allaitement. Parmi eux, les plus recommandés sont la sertraline et la paroxétine.
Il existe un risque de sevrage chez le nouveau-né d’environ 48h, généralement spontanément résolutif.
La prescription d’anxiolytiques, telle que les BZD, est limitée à 1 ou 2 semaines et réajustée pour évaluer le risque d’accoutumance. Ce type de molécule passe la barrière placentaire et d’autant plus au 3e trimestre de grossesse. Il existe un syndrome de sevrage néonatal qui peut être associé à d’autres symptômes d’hypotonie, d’hypothermie, des problèmes respiratoires. La persistance de ces symptômes peut s’étendre jusqu’à 1 mois après l’accouchement.
Pendant grossesse et l’allaitement, l’oxazépam est la BZD de référence, car la durée de vie est courte et les métabolites actifs ne passent pas dans le lait.
Concernant les psychotropes utilisés comme hypnotiques, le zolpiderm a une balance-bénéfice/risque positive pendant la grossesse mais pas pour l’allaitement en raison du manque de données. Par contre, le zopiclone a un profil de sécurité modéré pendant la grossesse et il est possible pendant l’allaitement.
Pour les femmes bipolaires, les antipsychotiques de deuxième génération sont recommandés en première intention.
La lamotrigine est une molécule thymorégulatrice qui peut être prescrite durant la période périnatale. Mais en cas d’allaitement, cette molécule passe dans le lait. C’est pourquoi le CRAT recommande un dosage plasmatique des transaminases et des concentrations de lamotrigine chez le nouveau-né à 2,3 semaines d’allaitement.
Pour les femmes présentant un TDAH, le méthylphénidate (MPH) est le psychostimulant utilisé pour la prise en charge de ce trouble. Il peut être utilisé à tous les stades de la grossesse si la balance-bénéfice/risque le justifie et avec un suivi adapté.
Le traitement de substitution aux opioïdes (méthadone, buorénorphine) pour éviter les rechutes et les importantes consommations aux toxiques pendant la grossesse est recommandée.
Les signes de sevrage touchent plus de 50% des nouveau-nés exposés aux opioïdes dans les 48 à 72 après la naissance. Les signes peuvent être retardés jusqu’à 7 jours. L’exposition in utero à la méthadone augmente le risque de sevrage néonatal et nécessite plus souvent une intervention thérapeutique.
Santé mentale maternelle, risques néonataux, il faut étudier la situation
Il est important pour les professionnels de santé de bien connaître l’arsenal thérapeutique pour traiter les femmes présentant des troubles psychiques pendant la grossesse. Idéalement, il est conseillé une consultation préconceptionnelle pour adapter au mieux le traitement.
Tout l’enjeu est de choisir la molécule en fonction du terme de la grossesse, du projet d’allaitement de la future mère, en évaluant la balance-bénéfice/risque pour préserver le bien-être maternel sans nuire au fœtus, pour réduire le risque de dépression du post-partum et favoriser la relation d’attachement.
Référence :
Prescription de psychotropes pendant la grossesse et l'allaitement
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