Le CNGOF a publié récemment des recommandations visant à prévenir et prendre en charge une infection herpétique pendant la grossesse ou à l’accouchement.
Herpès primaire ou non : définition
Les différents épisodes de l’histoire d’une infection à herpès se définissent avec le statut virologique et la clinique.
Sur le plan virologique, une séroconversion correspond à la présence d’immunoglobulines Ig G chez une patiente n’en présentant pas auparavant.
On distingue :
Une primo-infection (dite primaire) : Il s’agit d’un 1er épisode d’herpès HSV1 ou HSV2, quelle que soit la localisation (Ig G HSV 1 négatif, Ig G HSV2 négatif et PCR HSV1 ou HSV2 positive)
Une infection non primaire : Il s’agit d’un 1er épisode d’infection à HSV1 chez une patiente ayant déjà présenté une infection à HSV2 ou l’inverse (Ig G HSV1 positif, Ig G HSV2 négatif et PCR HSV2 positif ou Ig G HSV1 négatif, Ig G HSV2 positif et PCR HSV1 positif).
Une infection asymptomatique : Il peut s’agir d’une excrétion virale en l’absence de signes fonctionnels ou de lésions visibles.
Une récurrence : Il s’agit d’une réplication clinique virale chez une patiente ayant déjà manifesté des épisodes d’infection herpétique (Ig G HSV1 positif, Ig G HSV2 négatif et PCR HSV1 positif ou Ig G HSV1 négatif, Ig G HSV2 positif et PCR HSV2 positif).
Les outils diagnostics
Il est recommandé de privilégier la PCR à la culture et à la détection antigénique. Mais il faut savoir que la PCR ne s’inscrit pas dans la nomenclature des actes de biologie médicale et n’est donc pas remboursée par l’Assurance maladie.
En l’absence de lésion, la sérologie HSV doit être privilégiée pour déterminer le statut immunitaire chez une patiente ne présentant pas de lésion. En cas de lésion, sa prescription doit être limitée chez les patientes sans antécédent d’herpès génital afin de déterminer s’il s’agit d’une primo-infection, une infection non primaire ou d’une récurrence.
On suspecte des lésions herpétiques génitales chez une patiente sans antécédent
Un traitement antiviral peut être initié devant une suspicion d’épisode initial d’herpès génital, sans attendre les résultats des examens biologiques, en fonction de l’état clinique et du délai attendu des résultats (accord professionnel).
Le traitement
Aciclovir per os à raison d’un comprimé de 200 mg cinq fois par jour ou Valaciclovir à raison de deux comprimés de 500 mg deux fois par jour, pendant 5 à 10 jours en fonction de l’état clinique (grade C).
L’herpès est une infection sexuellement transmissible
Le principal facteur de risque d’infection initiale herpétique pendant la grossesse est l’existence d’une autre infection sexuellement transmissible (NP2), alors, il est recommandé de proposer à la patiente une sérologie VIH (grade B), et de réaliser chez elle et son partenaire un dépistage d’autres infections sexuellement transmissibles, en fonction du contexte (accord professionnel).
En présence d’ulcérations ou de symptômes évocateurs d’herpès génital, la patiente doit être informée du risque de contagion de son partenaire et de fait une abstinence sexuelle doit être conseillée (accord professionnel).
Prévention
Chez les femmes ayant présenté un épisode initial d’herpès génital pendant la grossesse, bien qu’il n’existe pas de bénéfice démontré du traitement prophylactique pour réduire le risque d’herpès néonatal, il est recommandé de mettre en place une prophylaxie antivirale, à partir de 36 semaines d’aménorrhée(SA) et jusqu’à l’accouchement, afin de réduire le risque de césarienne pour lésion herpétique (grade B). En cas de grossesse gémellaire, un traitement pourrait être initié dès 32 SA, en raison du risque majoré d’accouchement prématuré (accord professionnel), de même, dans certaines situations à risque important d’accouchement prématuré.
Ce traitement consiste en de l’aciclovir per os à raison de deux comprimés de 400 mg trois fois par jour ou du valaciclovir 500 mg deux fois par jour jusqu'à l'accouchement.
A l’accouchement
Le risque d’herpès néonatal est plus important lorsque l’épisode initial d’herpès génital survient à proximité de l’accouchement, en raison du risque d’excrétion virale et d’absence de séroconversion maternelle protectrice pour le nouveau-né (NP2).
Le temps nécessaire à une séroconversion, après un épisode initial d’herpès génital, est variable mais est le plus souvent inférieur à 6 semaines (NP3). En cas de présence de lésions et/ou de symptômes évocateurs d’un épisode initial d’herpès génital (ou d’épisode initial d’herpès génital confirmé) au moment du travail, il est recommandé de réaliser une césarienne, car cela permet vraisemblablement de diminuer le risque d’herpès néonatal en cas de primo infection herpétique (grade C).
En cas d’accouchement moins de 6 semaines après un épisode initial d’herpès génital, il est recommandé de réaliser une césarienne (accord professionnel).
En cas d’épisode initial d’herpès génital pendant la grossesse, de traitement antiviral prophylactique bien conduit, et d’absence de lésions et/ou de symptômes évocateurs au moment du travail, un accouchement par voie basse est possible, y compris lorsque cet épisode survient au troisième trimestre, tant que l’accouchement a lieu au moins 6 semaines après l’épisode infectieux (accord professionnel).
En cas de présence de lésions et/ou de symptômes évocateurs d’un épisode initial d’herpès génital (ou d’épisode initial d’herpès génital confirmé), et de rupture de la poche des eaux après 37 SA, il est recommandé de réaliser une césarienne, si possible dans les 4 heures suivant la rupture (accord professionnel), car cela pourrait permettre de diminuer le risque d’herpès néonatal (avis d’expert).
En cas de rupture des membranes prolongée à terme, et même en cas de travail, il est recommandé de réaliser une césarienne plutôt qu’une voie basse (accord professionnel), car même s’il n’y a pas de données dans la littérature permettant d’évaluer l’intérêt d’une césarienne dans ce cas de figure (NP4), un épisode initial d’herpès génital au moment de l’accouchement est la situation la plus à risque d’herpès néonatal (NP2).
En cas d’association d’un épisode initial d’herpès génital et d’une rupture prématurée des membranes, la prise en charge doit être décidée de façon multidisciplinaire, en prenant en compte principalement la problématique de l’âge gestationnel (accord professionnel). Plus l’âge gestationnel de la rupture est précoce, plus une expectative avec traitement antiviral sera à privilégier (accord professionnel).
Si l’accouchement a lieu plus de 6 semaines après l’épisode infectieux, un accouchement par voie basse est possible, en cas de rupture prématurée des membranes, en l’absence de lésions et/ou de symptômes évocateurs au moment du travail (accord professionnel).
On suspecte des lésions herpétiques chez une patiente avec des antécédents connus
Prélèvement ou pas ?
Il n’est pas recommandé de faire un prélèvement pour confirmer qu’il s’agit d’une lésion d’herpès (accord professionnel). Néanmoins, devant une lésion atypique, une confirmation virologique est recommandée, par écouvillonnage de la lésion, afin de pratiquer une recherche du virus par PCR ou culture (accord professionnel)
Traitement
Il n’y a pas d’étude permettant d’évaluer l’efficacité d’un traitement antiviral sur la symptomatologie en cas de récurrence d’herpès génital pendant la grossesse.
Un traitement antiviral par aciclovir (200 mg x 5 par jour) ou valaciclovir (500 mg x 2 par jour) pendant 5 jours, peut être proposé, pour réduire la durée et l’intensité des symptômes, devant des prodromes ou une récurrence d’herpès génital, dans les 24 heures suivant le début de l’éruption chez une femme enceinte très invalidée par ses symptômes (grade C).
Prévention
Chez les femmes ayant présenté au moins une récurrence pendant la grossesse, bien qu’il n’existe pas de bénéfice démontré du traitement prophylactique pour réduire le risque d’herpès néonatal, il est recommandé de proposer une prophylaxie antivirale à partir de 36 SA, afin de réduire le risque de césarienne pour lésion herpétique (grade B).
Les antiviraux recommandés sont : l’aciclovir, à la posologie de 200 mg 5 fois par jour per os, ou le valaciclovir, à la posologie de 500 mg, 2 fois par jour per os, jusqu’à l’accouchement.
Dans les situations à risque de naissance prématurée (menace d’accouchement prématuré, grossesse multiple), la prophylaxie pourra être débutée plus précocement (accord professionnel).
Chez les femmes ayant un antécédent d’herpès génital et pour lesquelles le dernier épisode de récurrence est antérieur à la grossesse, le bénéfice du traitement prophylactique n’est pas démontré. Il n’est donc pas recommandé de proposer systématiquement une prophylaxie antivirale aux femmes qui n’ont pas eu de récurrence pendant la grossesse, mais elle sera d’autant plus à considérer que les récurrences étaient récentes et fréquentes avant la grossesse (accord professionnel).
A l’accouchement
En cas de prodrome ou de lésion clinique d’herpès génital chez une femme en début de travail ayant un antécédent d’herpès connu, les données de la littérature ne permettent pas de recommander une voie d’accouchement plutôt qu’une autre (accord professionnel).
Une césarienne sera d’autant plus à considérer que les membranes sont intactes, et/ou en cas de prématurité et/ou en cas de séropositivité au VIH (accord professionnel).
En revanche, un accouchement par voie vaginale sera d’autant plus à considérer qu’il existe une rupture des membranes prolongée, après 37 SA et en l’absence de séropositivité au VIH (accord professionnel).
En cas de récurrence herpétique chez une femme présentant une rupture prématurée des membranes avant 37 SA, les risques liés à la prématurité et les risques d’herpès néonatal doivent être mis en balance.
Source : Collège National des Gynécologues et Obstétriciens Français – mises à jour en gynécologie, tome II, publiée par I.Nisand, P.Deruelle, O.Graesslin