L’allaitement maternel est bénéfique pour la santé des nouveau-nés et encore plus pour les prématurés ! En ce sens, SOS Préma et la marque KITETT se sont associés pour promouvoir l'allaitement maternel et accompagner les mères, aux côtés des soignants.
Il n’est pas toujours évident d’allaiter et certaines mères peuvent se décourager alors que le lait maternel apporte de nombreux bienfaits pour le développement d’un prématuré.
S’engager pour la promotion de l’allaitement maternel auprès des mères de prématuré est un véritable enjeu de santé publique ! Laurence Girard, présidente du comité scientifique de SOS Préma nous en dit plus sur cet engagement.
Pourquoi l'association SOS Préma aux côtés de KITETT s'est-elle engagée pour promouvoir l’allaitement maternel auprès des mères de prématuré ?
Le fait de nourrir leur bébé avec leur propre corps donne à de nombreuses femmes un sentiment de puissance et d’accomplissement essentiel. Certaines qui n’y parviennent pas, malgré une grande motivation en conçoivent beaucoup de déception, et parfois des blessures dont elles témoignent des décennies plus tard avec beaucoup de désarroi. Les aider à allaiter aujourd’hui c’est les voir plus heureuses demain, plus accomplies en tout cas.
Le fait d’allaiter sur de longues périodes (plus de 6 mois) par grossesse ou pour une durée totale d’allaitement, a un effet protecteur puissant sur la survenue de maladies chroniques chez les femmes avant ou après la ménopause : diminution de maladies cardio-vasculaires (maladies coronariennes, infarctus du myocarde, hypertension), diminution du risque de maladies métaboliques ( diabète de type 2, syndrome métabolique), réduction du risque de survenue du déclin cognitif et de la maladie d’Alzheimer, diminution du risque de développer une endométriose et même une sclérose en plaques. La grossesse a un coût métabolique exhorbitant pour l’organisme maternel et l’allaitement remet après chaque grossesse les compteurs « à zéro ». Certains bénéfices apparaissent dès une durée d' un mois d’allaitement et pour d’autres, il faut attendre une durée de six à neuf mois d’allaitement pour des bénéfices très significatifs. Soutenir les femmes qui souhaitent allaiter dans la durée, c’est alléger le fardeau des maladies chroniques et améliorer la qualité de vie des femmes, même dans leur grand âge.
Les enfants allaités présentent eux aussi une meilleure santé dont les principaux effets sont : une réduction des infections respiratoires, ORL et intestinales et une moindre hospitalisation pour bronchiolite, otite moyenne et troubles gastro-intestinaux, y compris dans les pays riches où nous vivons. Et cela dure dans le temps puisque les enfants allaités ont une moindre tension artérielle à l’âge adulte, présentent moins de problèmes cardiaques ou de diabète; voire ont un développement cognitif de meilleure qualité selon les études menées en France chez des enfants nés prématurément.
Quelles sont les problématiques actuelles ?
Nous attendons avec impatience les résultats de la dernière enquête périnatale 2021 menée par l’INSERM grâce aux 1 400 sages-femmes enquêtrices, et qui sera grâce à leur mobilisation, certainement très riche. Nous savons grâce à l’enquête périnatale 2016, que le taux d’allaitement exclusif ou non ont reculé en en France entre 2010 et 2016 : "la fréquence de l’allaitement maternel exclusif durant le séjour à la maternité a diminué de manière importante entre 2010 et 2016, de 60 % à 52 % ; de plus, l’allaitement maternel à la maternité, qu’il soit exclusif ou mixte, a légèrement diminué, de 68 % en 2010 à 66 % en 2016.» (ENP 2016 Inserm ).
La pratique de l’allaitement, d’autant plus exclusif, est un marqueur des inégalités sociales : les femmes ayant atteint un niveau d'études élevé, allaitent d'avantage exclusivement et longtemps. Cela constitue une perte de chances d’autant plus grande pour les mères et leurs bébés qui ne bénéficient pas de l’allaitement pour des raisons sociologiques : donner le sein et son lait a longtemps été un travail accompli par des femmes en servitude. Donner le sein est considéré comme une pratique de « pauvres », une pratique pour ceux qui n’ont pas les moyens d’acheter du lait en poudre pour leur bébé. Parce que le lait en poudre semble meilleur, plus blanc, plus riche puisque plus cher …
Combien y a-t-il de prématurés bénéficiant de l’allaitement maternel ?
En France, tous les enfants prématurés nés avant 32 semaines, reçoivent jusqu’à 32 SA du lait humain, soit celui de leur mère, soit celui d’autres femmes qui donnent leur lait pour sauver des bébés fragiles. Après 32 SA, le bébé reçoit soit le lait de sa mère, soit un substitut dit « lait pour prématuré ».
Nous connaissons le taux d’allaitement des enfants nés prématurés avant 34 SA grâce au travail du Docteur A. Mitha réalisé sur la cohorte EPIPAGE 2 (2011) sur tous les services de néonatalogie de France : "Au total, 47% des enfants nés avant 32 SA et 59% des enfants nés entre 32 et 34 SA recevaient du lait maternel à la sortie d'hospitalisation, avec une variabilité inter-unités respective de 21% à 84% et de 27% à 87%. Les politiques d’unités soutenant l’allaitement, en particulier le peau-à-peau précoce, la participation des parents à l’alimentation de leur enfant, étaient en partie associées à cette variabilité. " Comme on peut le constater, le fait d’être allaité à la sortie de néonatalogie peut dépendre assez grandement du lieu d’hospitalisation et des pratiques qui y ont cours; ce qui représente une autre source d’inégalités face à la santé, territoriale cette fois.
Comment accompagner les mères de prématuré qui souhaitent allaiter ?
Dès la salle de naissance, lui montrer et lui expliquer comment elle peut extraire manuellement un peu de colostrum de ses seins et le recueillir afin qu’il soit donné au nouveau-né en néonatalogie. Pourquoi une telle pratique alors que la mère est sans doute "sous le choc » d’une naissance prématurée et de l’hospitalisation nécessaire de son bébé ?
- Parce qu’elle se sent alors « puissante » et non plus « impuissante » à aider son bébé : elle peut faire quelque chose pour lui d’essentiel qui peut le protéger et lui permettre de sécréter plus facilement ses propres défenses immunitaires ( Lee & al. 2015). Et une mère qui se sent puissante, c’est une mère en voie de guérison du traumatisme que constitue la fin abrupte de la grossesse et la culpabilité de voir son bébé hospitalisé
- Parce que les études (Parker & al 2015, 2016) montrent que les femmes qui ont pu exprimer du colostrum de leur sein dans l’heure qui suit la naissance de leur bébé, ont 2 à 3 fois plus de lait, 3 semaines après, comparées à celles qui n’ont pu le faire. Donc si on veut faciliter la vie de la mère d'un bébé prématuré, cette pratique simple en salle de naissance est une aide extrêmement efficace.
- Parce que d’autres études (Fischer-Fumeaux C. & al. 2017, Snyder M. & al. 2017) montrent que les femmes qui ont su que leur bébé recevaient leur colostrum ont allaité plus fréquemment et de façon exclusive au cours des 6 mois suivant la sortie d’hospitalisation, que celles pour lesquelles le colostrum n’était pas donné à leur bébé. Lorsque les femmes savent que leur colostrum est donné à leur bébé, l’allaitement est facilité… même s’il est difficile de dire pourquoi il en est ainsi.
Permettre de faire du peau à peau avec le bébé, aussitôt, aussi souvent et autant que possible jusqu’à la fin de l'hospitalisation, voire à l’arrivée au domicile si les choses sont encore fragiles : plusieurs études montrent l’effet positif de la pratique du peau à peau sur les compétences du bébé à téter au sein et une étude a pu déterminer que l’établissement de l’allaitement au sein chez des bébés grandement prématurés (nés avant 31 SA), était directement corrélé au nombre d’heures de peau peau qu’ils avaient pu recevoir au cours de l’hospitalisation (Oras P. & al 2015)
Suivre la production lactée de la mère et évaluer avec elle quand sa production ralentit comment elle peut l’a relancer : il existe un corpus de techniques et de pratiques qui ont démontré leur efficacité, mais encore faut-il savoir qu’il est nécessaire de les mettre en oeuvre et s’intéresser à la mère, ses seins, son ressenti et sa production en est le meilleur et l’unique moyen.
Si la femme enceinte est hospitalisée au cours de la grossesse car elle présente une menace d’accouchement prématuré : la femme vit avec une épée de Damoclès suspendue au dessus de la tête sans pouvoir agir, si ce n’est attendre. Aborder avec elle comment elle peut accueillir son bébé quand il naîtra, un jour, combien le peau à peau est utile pour le bébé, et aussi pour avoir du lait qu’elle peut donner, un petit peu, beaucoup, passionnément ou pas du tout … que donner son lait, n’est pas allaiter, et que donner ou allaiter peut s’arrêter quand elle le décide …Ce serait une chance pour elle d’ouvrir des possibles qui la rendent actrice de sa maternité, dès sa grossesse, et faciliterait sa résilience vis à vis du traumatisme d’accoucher prématurément ou même d’en avoir peur.
Pourquoi le don de lait est-il important ?
Le don de lait peut être anonyme : alors ce précieux liquide pourra être donné à des prématurés qui ne peuvent en recevoir de leur propre mère et leur éviter des maladies très invalidantes, voire mortelles telles que l’entérocolite ulcéronécrosante. Parfois les nouveau-nés en décèdent, parfois on parvient à les sauver en réséquant une partie de leur intestin et en mettant en place une stomie. Le fait de recevoir du lait de donneuses plutôt qu’un lait pour prématuré diminue grandement ce risque. Il en est de même pour la maladie de la rétine (rétinopathie) qui provoque une très grande perte de l’acuité visuelle pouvant aller jusqu’à la cécité. Donc le don de lait est essentiel pour les bébés prématurés.
Le don de lait peut-être aussi de la maman vers son bébé : on dit alors qu’il est dirigé. Si le lait de la maman est donné fraichement tiré et non pasteurisé, ses bénéfices sont encore plus grands. C’est pourquoi de nombreux services de néonatalogie s’appliquent chaque jour d’avantage à permettre le don de lait "frais et cru » de la maman vers son bébé.
Quels messages forts souhaitez-vous diffuser ?
L’allaitement n’est pas gratuit : il nécessite l’engagement de la mère, de son corps, de son temps et aussi le soutien de son entourage … et représente une source de santé pour la société toute entière. Allaiter, si possible au sein, est la façon la plus sûre de protéger la santé de l’enfant et de la mère et ce, pour de très longues années, voire toute la vie.
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