Des chercheurs ont quantifié l’évolution des prescriptions pédiatriques en France entre 2010 et 2019. L’étude publiée dans The Lancet Regional Health Europe alerte sur des taux de prescription trop importants chez les enfants de moins de 6 ans.
La France est l’un des pays européens consommant le plus de médicaments et les enfants âgés de moins de 6 ans ne sont pas épargnés selon cette étude réalisée par des chercheurs de l’Inserm et enseignants-chercheurs d’Université de Paris au Centre de Recherche en Épidémiologie et Statistiques (CRESS), avec des chercheurs de l’université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines / Université Paris-Saclay et de l’AP-HP, du groupement d’intérêt scientifique Epi-Phare.
Plus de 230 millions de dispensations de médicaments, sur la période 2018-2019, ont été analysées. Celles-ci provenaient de prescriptions en ambulatoire provenant de médecins, sages-femmes ou dentistes chez des enfants de moins de 18 ans. Ces données ont été comparées aux prescriptions médicamenteuses sur la période 2010-2011.
Des taux élevés de prescriptions pédiatriques en ambulatoires
Parmi les enfants âgés de moins de 6 ans, plus de 97 sur 100 étaient exposés aux médicaments sur une année entre 2018 et 2019. Les classes thérapeutiques les plus prescrites étaient les antalgiques avec 63%, les antibiotiques (40%), les corticoïdes par voie nasale (33%), la vitamine D (30%), les anti-inflammatoires non stéroïdiens (24%), les antihistaminiques (25%) et les corticoïdes par voie orale (21%).
En comparant ces taux à la période 2010-2011, les chercheurs ont constaté une diminution de 12% de la prescription d’antibiotiques. Une évolution par ailleurs insuffisante, comme l’explique le Dr Marion Taine, co-auteure de l’étude dans le communiqué de l’INSERM, « car plus d’un enfant de moins de 6 ans sur deux a reçu une prescription d’antibiotique dans l’année ». De plus, la prescription de corticoïdes par voie orale est restée stable entre les deux périodes chez les enfants de moins de 6 ans « malgré les effets indésirables connus de cette classe thérapeutique ».
Enfin, la co-auteure souligne également que la prescription d’inhibiteurs de la pompe à proton a concerné, en 2018-2019, 2% des nourrissons de moins de 6 semaines alors « que la fréquence des affections pour lesquelles ce traitement est recommandé est bien inférieur à cet âge ».
Les médicaments en France
Si l’on compare à d’autres pays, la prescription des antibiotiques en France est 5 fois supérieure par rapport aux Pays-Bas et celle des corticoïdes oraux 5 à 20 fois supérieure comparativement aux pays américains et norvégiens.
Alors pourquoi une telle différence par rapport à d’autres pays ? Selon les auteurs, les médicaments auraient une image positive en France tant auprès des prescripteurs que de la population. Toutefois, au vu de ces résultats préoccupants, « une meilleure information de la population et des prescripteurs vis à vis de l’usage des médicaments chez l’enfant est indispensable » pour conduire à un rapport plus conscient de la balance bénéfices-risques des médicaments auprès d’une population plus vulnérable.
Photo de Polina Tankilevitch provenant de Pexels