En demande de médicalisation ou à l’inverse, refusant des surveillances médicales, un déclenchement, ou bien une césarienne, l’autonomie de la patiente doit être respectée. Mais dans la mesure où la vie de la mère et de l’enfant peuvent être en jeu, trouver l’équilibre entre le médico-légal et l’éthique n’est pas si simple. Alors comment réagissent les sages-femmes dans un tel contexte ?
Une méta-analyse ethnographique parue dans le Midwifery Journal a fait la synthétise des attitudes et des expériences des sages-femmes donnant des soins aux femmes s’opposant à des choix de naissance conventionnels. Ce travail original a porté sur 5 études et 55 sages-femmes (indépendantes et employées).

Choix de naissance non conventionnels : Quelles sont les femmes concernées ?

Selon la perception des sages-femmes, les femmes optant pour des choix de naissance non conventionnels, sont plutôt instruites, indépendantes et assumant leur responsabilité. Elles ont aussi constaté qu’une expérience traumatisante lors d’un précèdent accouchement influençait ce choix.

Entre le respect de l’autonomie et la mise en danger du foetus

Les sages-femmes ont rapporté à travers les études que les femmes étaient en droit de prendre leur propre décision concernant leur accouchement même si elle était à l’encontre de l’avis médical ou du protocole de service. Par ailleurs, dans des situations spécifiques les points de vue sur l’autonomie des patientes divergeaient.  Des sages-femmes craignaient, par exemple, que le choix des femmes ne soit pas dans l’intérêt du fœtus. Certaines étaient dans une véritable détresse émotionnelle lorsque les femmes refusaient un transfert à l’hôpital pour des complications fœtales.

Vulnérabilités et tensions des professionnels

Accompagner les femmes « hors protocole », c’est aussi s’exposer au stress, à la peur du médico-légal puisqu’en cas de complication de la mère ou du fœtus la responsabilité de la sage-femme est engagée. Certaines sages-femmes ont ainsi déclaré se sentir en dehors de leur zone de confort et frustrées à l’égard de certaines demandes considérées comme « idiotes, stimulantes ou délicates ». D’autres estimaient que les choix non conventionnels prenaient plus de temps au détriment des soins d’autres patientes. Aussi, des sages-femmes ont signalé se sentir jugées par leurs collègues, « j’ai l’impression que les sages-femmes pensent que ça va aller mal ». D’autres, encore, pensent que le respect strict des protocoles  crée des craintes inutiles, « c’est une ligne directrice, ce n’est pas une loi, ce n’est pas un évangile ».

Respect des protocoles, respect des choix des femmes

Les auteurs de l’étude évoquent en lien avec d’autres données sur le sujet qu’il y a  des sages-femmes « orientées vers la procédure », là l’organisation et les protocoles priment sur le besoin des femmes et des sages-femmes « orientées vers les femmes » où les besoins de la femme guident les soins. Ils suggèrent ainsi que des sages-femmes sont « facilitatrices » de choix de naissance non conventionnels avec une idéologie éthique et philosophique des femmes. D’autres sont par ailleurs, celles orientées vers la tâche et les protocoles et qui acceptent les choix « à contrecoeur »

Les soins des femmes sont en cœur de la pratique des sages-femmes, tout comme le respect de leur choix.  Mais avant de se sentir tiraillé entre l’éthique et le médico-légal, ne faut-il pas  informer la patiente en amont de l’accouchement ?
Car si le choix de naissance peut- être considéré comme « limite », parallèlement la conjoncture institutionnelle via les protocoles semble influencer le ressenti des sages-femmes quand le souhait de naissance n’est pas classique. La discussion entre équipe médicale et la patiente demeure  essentielle pour fournir des soins de qualité et optimaux pour la dyade mère-enfant.

Référence : 
aring for women making unconventional birth choices : A meta-ethnography exploring the views, attitudes, and experiences of midwives. Midwifery 2019 ; 72 : e50-59.