Parmi les situations contraceptives particulières, le post-partum en fait partie. Le taux d’IVG dans les 6 à 12 mois qui suivent la naissance s’évalue en France à 4% soit plus de 2 fois du taux moyen annuel. Aborder les modes de contraception en post-partum s’imposent donc pour cette période où des changements physiologiques, émotionnels et sexuels s’opèrent.
Avec Dr Teddy Linet, gynécologue-obstétricien, centre hospitalier Loire-Vendée.
Sortir de la maternité avec une contraception efficace
Quand vient le moment de parler contraception au sortir de la maternité, la réceptivité des patientes n’est pas à son maximum, pour autant, si ce sujet n’a pas été abordé lors de la grossesse, il ne devra pas passer à l’as. Le CNGOF recommande d’ailleurs aux professionnels que toutes les femmes sortent de la maternité avec une contraception efficace pour limiter le risque de grossesse non désirée.
Il est important de leur expliquer qu’une ovulation est possible à partir du 21e j après l’accouchement quand il s’agit d’un allaitement artificiel. Pour l’allaitement maternel, qui induit une anovulation, le retour de couches est imprévisible : 33% ovulent à la 6e semaine et plus de 70% à 6 mois.
Quelles modes de contraception en post-partum ?
Pour les femmes qui le souhaitent, l’HAS recommande de débuter une contraception au plus tôt dans les 21 jours du post-partum. Les progestatifs, non associés à un risque thrombo-embolique veineux (TEV) ( hormis les injectables) restent une option pour cette période. En effet, 50% des évènements TEV surviennent dans le post-partum, notamment durant les 3 premières semaines suivant l’accouchement, avec un risque persistant jusqu’à 12 semaines.
Pour le CNGOF et l’OMS, les micro-progestatifs et l’implant peuvent être initiés bien plus tôt, dans les 48h suivant la naissance quel que soit le mode d’allaitement. Pour les femmes préférant une méthode longue durée, ou dont l’observance fait défaut, le DIU sera aussi adapté à cette période.
Si la France reste frileuse pour une pose du DIU dans les 48 premières heures, il n’en demeure pas moins qu’elle réduirait de 88/1000 femmes le nombre de grossesses non désirées sur 2 ans, selon une étude américaine. Passé ce délai précoce, l’OMS recommande d’attendre 4 semaines pour une pose de DIU que la patiente ait eu une césarienne ou non. Le CNGOF, pour sa part, suggère une pose lors de la visite postnatale, d’un DIU hormonal ou en cuivre et ce indépendamment du mode d’allaitement.
En raison du risque élevé des MTEV (X 22 à 84 selon l’OMS) dans le post-partum, jusqu’à 42 jours, il est plus prudent de recourir aux oestroprogestifs dépassé ce délai, selon le CNGOF. Si la patiente tient à reprendre une pilule oestroprogestative, le CNGOF recommande entre la 6e et 12e semaine d’évaluer la balance bénéfice-risque en tenant compte des facteurs de risques associés (tabac, >35 ans, IMC > 30, hémorragie du post-partum, césarienne, pré-éclampsie, tabac, transfusion à la naissance, immobilisation prolongée, migraines). En revanche, l’OMS, en absence de facteur de risque et de contre-indication, envisage la prise d’oetroprogestatifs 21 jours après l’accouchement pour les femmes non allaitantes et 6 semaines après en cas d’allaitement partiel. Pour l’ensemble des sociétés savantes en dehors du CRAT, les femmes qui allaitent devront attendre 6 mois avant de commencer une contraception oestroprogestative.
Les méthodes naturelles et locales
La méthode de l’allaitement maternel et de l’aménorrhée, MAMA, (allaitement exclusif, de jour et de nuit, 6 à 10 tétées/j, pas plus de 6h entre les tétées la nuit et 4h le jour, aménorrhée persistante) est une méthode contraignante puisque seulement 20 à 26 % des patientes suivent les conditions. Une publication postérieure aux recommandations du CNGOF a permis de montrer que la méthode MAMA n’était pas plus efficace qu’un allaitement exclusif simple chez une femme en aménorrhée dans les 6 premiers mois du post-partum. L’allaitement exclusif chez une femme en aménorrhée présente cependant un effet contraceptif jusqu’à 6 mois. Il s’agit néanmoins d’un choix « risqué » puisque le retour de cycle est imprévisible et dans les études, on note un risque de grossesse à 6 mois allant de 0,45 à 2, 45%. Mal adaptés pour cette période et avec un taux d’échec important, le CNGOF déconseille l’utilisation des méthodes locales (diaphragme et cape), excepté le préservatif.
Références :
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