Les recommandations sur la prise en charge du nouveau-né à risque d’infection néonatale bactérienne précoce supérieur ou égal à 34 SA ont été réactualisées. En voici les grandes lignes. ».
Les nouveau-nés de 34 SA et plus concernent 800 000 naissances en France chaque année
Une problématique quotidienne pour les professionnels de la périnatalité qui se heurtaient jusque-là, à une prise en charge très médicalisée, comprenant des examens complémentaires invasifs et même délétères pour l’enfant. Ces recommandations de bonne pratique labellisées par l'HAS, proposent des modalités de prise en charge supprimant des examens complémentaires inutiles, en accord avec les dernières données de la science.
Les facteurs de risque anténatals d’infection bactérienne néonatale précoce
On note des facteurs de risque anténatals avec un niveau de preuve élevé (grade A). Parmi eux :
Une colonisation maternelle à streptocoque B durant la grossesse actuelle
Un antécédent d’infection néonatale à streptocoque B lors d’une précédente grossesse
Une fièvre maternelle > 38,0° C en per-partum (ou dans les 2 heures qui suivent l’accouchement)Une durée de rupture des membranes supérieure à 12 heures
Une prématurité spontanée et inexpliquée < 37 SA
Quand indiquer l'antibioprophylaxie?
L’ antibioprophylaxie ou une antibiothérapie per-partum sera indiquée pour les 3 premiers items. Mais aussi, lorsque le statut du PV est inconnu et qu’il est associé à une durée de la rupture des membranes supérieure à 12 heures ou bien à une prématurité inexpliquée inférieure à 37 SA.
Dans ces cas l’antibiothérapie sera administrée par voie parentérale, au moins 4h avant la naissance, en utilisant la pénicilline G, l’ampicilline ou l’amoxicilline, ou la céfazoline.
Les signes cliniques du nouveau-né qui doivent faire évoquer une infection néonatale précoce
La majorité de ces signes cliniques ne sont pas spécifiques d’une infection, néanmoins leur présence dans les 48 premières heures de vie doit faire évoquer une infection bactérienne néonatale précoce:
Signes généraux : fièvre (température ≥ 38,0°C) ou hypothermie (température < 36,0°C)
Signes respiratoires : détresse respiratoire (geignement, battement des ailes du nez, signes de rétraction), tachypnée (FR > 60/min), et apnée.
Signes hémodynamiques : tachycardie (> 160 bpm) ou bradycardie (< 80 bpm), signes de choc (augmentation du temps de recoloration cutanée, pâleur, hypotension artérielle, oligurie)
Signes neurologiques : somnolence, irritabilité, hypotonie, convulsions
Signes digestifs : refus de boire, vomissements
Les signes de gravité d’infection bactérienne néonatale précoce :
destroubles hémodynamiques nécessitant un remplissage vasculaire ou l’administration de drogues vaso-actives
des signes cliniques neurologiques (troubles de la conscience ou convulsions)
Les nouveau-nés symptomatiques nécessitant une antibiothérapie devront alors être hospitalisés sans un niveau de soin adéquat.
Les nouveau-nés asymptomatiques à risque d’infection bactérienne néonatale précoce
Lesnouveau-nés présentant des facteurs de risque d’infection néonatale précoce font l’objet d’une surveillance spécifique dans le service de suites de naissances ou dans un niveau de soins adéquat. Ils peuvent être répartis dans ces 3 catégories :
Les nouveau-nés dont la mère a reçu une antibioprophylaxie per-partum adéquate (pour une colonisation maternelle à streptocoque B ou un antécédent d’infection néonatale à streptocoque B ou une rupture des membranes de plus de 12 heures, ou une prématurité spontanée et inexpliquée).
Cesnouveau-nés nécessitent une surveillance habituelle en suites de couches et ne devront pas sortir de la maternité avant 48 heures.
Les nouveau-nés dont la mère a reçu une antibioprophylaxie per-partum inadéquate (incluant l’absence d’antibioprophylaxie alors qu’elle était indiquée) ou dont la mère a reçu une antibiothérapie per-partum adéquate pour une fièvre > 38°C.
Ces nouveau-nés font l’objet d’une surveillance standardisée en suites de naissances toutes les 4 heures pendant les premières 48 heures à l’aide d’une grille de surveillance adaptée aux conditions locales de la maternité. L’apparition d’un signe clinique impose la réalisation, sans délai, d’un examen clinique par le pédiatre et la réalisation d’examens complémentaires, ainsi que la mise en route d’une antibiothérapie si nécessaire après prélèvement d’une hémoculture
Les nouveau-nés dont la mère a reçu, pour une fièvre > 38°C, une antibioprophylaxie ou une antibiothérapie per-partum inadéquate.
Ce sont ceux pour lequel le risque d’infection néonatale précoce est le plus élevé. Les recommandations préconisent une surveillance standardisée en suites de couches toutes les 4 heures pendant les premières 48 heures à l’aide de la grille de surveillance adaptée aux conditions locales de la maternité et un examen clinique par un pédiatre entre H6 et H12. La survenue d’un signe clinique dans ce contexte impose l’administration d’une antibiothérapie probabiliste dans les plus brefs délais après avoir prélevé une hémoculture.
Les critères cliniques à prendre en compte pour surveiller ces nouveau-nés asymptomatiques
Les recommandations précisent que le pédiatre ou la sage-femme doivent être appelés dans ces cas :
Température ≥ 38,0°C ou < 36,0°C
Fréquence cardiaque > 160 / min (au calme) ou < 80 / min
Fréquence respiratoire > 60 / min
Présence d’un tirage, d’un geignement ou d’apnée
Teint cutané anormal : pâleur, cyanose, marbrures, ou teint gris
Tout signe clinique ou changement d’état qui inquiète l’équipe soignante
Quels examens complémentaires chez les nouveau-nés à risque d’infection bactérienne néonatale précoce ?
L’hémoculture est l’examen de référence recommandé pour établir le diagnostic étiologique de de l’infection néonatale précoce .Il est recommandé de prélever une hémoculture pour tout nouveau-né présentant des signes cliniques d’infection bactérienne néonatale précoce avant l’instauration d’une antibiothérapie probabiliste.
Concernant la ponction lombaire, elle est effectuée en cas d’hémoculture positive à un germe pathogène ou bien lorsque le nouveau-né présente une altération de l’état général ou des signes cliniques neurologiques et dont l’état clinique est compatible avec la réalisation du geste.
Le prélèvement du liquide gastrique et les prélèvements périphériques (oreilles et anus) ne sont plus recommandés dans la prise en charge du risque d’infection néonatale précoce chez le nouveau-né 34 SA.
En cas de fièvre maternelle avec notion d’exposition à Listeria et/ou d’anomalies macroscopiques placentaires (micro-abcès), il est recommandé de réaliser un frottis placentaire et une culture du placenta .
Pour les examens complémentaires non bactériologiques à effectuer à la naissance, Il n’est plus recommandé de prélever une NFS ou d’effectuer un dosage de la CRP à la naissance dans la démarche diagnostique de l’infection bactérienne néonatale précoce, ni même d’effectuer de dosage de la CRP ou de la PCT à la naissance lors de l’instauration d’une antibiothérapie chez un nouveau-né suspect d’infection.
La recommandation préconise d’effectuer un dosage de la CRP à l’instauration d’une antibiothérapie chez un nouveau-né suspect d’infection néonatale précoce lorsque celle-ci est débutée après 12 heures de vie. La réalisation d’un dosage de la CRP 24 et 48 heures après le début de l’antibiothérapie peut être utile pour conforter la décision d’arrêter une antibiothérapie chez un nouveau-né pour lequel l’hémoculture est négative à 48 heures.
L’antibiothérapie
Tous les nouveau-nés présentant une symptomatologie clinique évoquant une infection néonatale précoce doivent bénéficier rapidement d’un examen clinique complet et recevoir une antibiothérapie probabiliste après prélèvement d’une hémoculture.
En première intention, chez le nouveau-né supérieur ou égal à 34 SA suspect d’infection et symptomatique sans signes de gravité, il est préconisé l’amoxicilline et la gentamicine.
Pour le nouveau-né présentant des signes de gravité (troubles hémodynamiques ou signes cliniques neurologiques) possiblement attribuables à l’infection, les préconisations orientent vers la céfotaxime et la gentamicine.
L’arrêt de l’antibiothérapie doit être envisagé dès 48 heures après le début du traitement car elle n’est pas justifiée si l’hémoculture est stérile, si l’examen clinique est normal et si on note une stabilité ou une diminution de la valeur de la CRP. Par la suite, l’enfant doit bénéficier d’une surveillance clinique pendant 24 à 48 heures supplémentaires à l’appréciation du clinicien.
Dans d’autres situations, en l'absence de documentation bactériologique, la poursuite de l’antibiothérapie se fera selon appréciation du pédiatre : un nouveau-né qui a présenté des signes de gravité ou bien un nouveau-né avec un état clinique fortement évocateur d’infection bactérienne sans signe de gravité .
En cas d’infection documentée, l’antibiothérapie s’étendra sur 7 jours en cas de bactériémie, 14 jours en cas de méningite à streptocoque B et 21 jours en cas de méningite à bactérie Gram négatif.
Source : Prise en charge du nouveau-né à risque d’infection néonatale bactérienne précoce (≥ 34 SA) - RPC Société Française de pédiatrie - 2017