Améliorer la santé maternelle au Cameroun, là où le taux de mortalité maternelle reste préoccupant est un véritable défi que relève l’association « Parfait pour Jaden ». Nous avons rencontré sa présidente, Amélie Ebongué.
Pourquoi avoir créé l’association « Parfait pour Jaden »?
À la suite de mon premier voyage au Cameroun, dont je suis originaire, j’ai constaté que le Ministère de la Santé publique avait réduit le budget. La santé devrait pourtant être priorité pour chaque état. Là-bas, la réalité est tout autre, pour accoucher, bénéficier de soins dans un hôpital, ou dans un centre médical, c’est environ 5% à 31%, selon le type d’accouchement, du salaire moyen !
Pourtant les chiffres de mortalité maternelle sont préoccupants, le Ministère de la Santé publique du Cameroun a enregistré environ 6000 décès maternels en 2017. Un ratio en augmentation depuis une quinzaine d’années qui est passé de 430 pour 100 000 naissances en 1998 à 782 en 2011. C’est pourquoi je souhaite vraiment à travers l’association sensibiliser la population à la santé maternelle.
Quels sont les objectifs de l’association et vers quelle population vous centrez-vous plus spécifiquement ?
En ce qui concerne les objectifs, je dirai:
Améliorer les conditions d’accouchement
Renouveler le système de santé
Former le personnel existant aux évolutions du métier de sage-femme
Sensibiliser et développer la prévention en matière de santé maternelle
L’association « Parfait pour Jaden » se centre surtout sur les femmes qui vivent dans les villages, où la proportion d’assistance à l’accouchement par un professionnel qualifié est deux fois plus basse, comparativement à celles qui résident en milieu urbain. Elles peuvent parcourir plus de 50km pour accoucher à l’hôpital ce qui les expose à un sur risque de décès en cours de route.
Dans les milieux reculés, 60% des femmes recourent à une matrone pour l’accouchement à domicile. Mais, les matrones ont des pratiques ancestrales et ne sont pas forcément formées au métier de sage-femme… Une perte de chance pour ces femmes dont les causes directes de décès sont représentées par les hémorragies du post-partum, les infections et les éclampsies.
Le constat est alarmant, que font les politiques ? La population en a-t-elle conscience ?
Depuis 2015, le Ministère incite davantage les femmes aux plus grands besoins, c’est-à-dire celles vivant au Nord du Cameroun à bénéficier de soins dans des structures médicalisées pour l’accouchement. il a lancé un projet, baptisé « Chèque santé » soutenu par l’Agence Française de Développement. Avec une valeur de 6000 CFA soit environ 9,1€, cette participation prend en charge quatre consultations de suivi de grossesse, une échographie, l’accouchement voie basse ou par césarienne, les pathologies qui retentissent sur la grossesse, puis le suivi postnatal mère-enfant sur les 42 jours suivant la naissance.
Trois ans après son lancement, il est toutefois difficile de savoir si le projet a réduit la mortalité maternelle dans la région car « on ne peut pas comparer car il faudrait obtenir les données des décès en communauté". Ce suivi n’a pas été effectué. Mais, le nombre d’accouchements assistés a augmenté de façon exponentielle. Certains centres de santé qui géraient à peine 5 accouchements par mois, se sont retrouvés à prendre en charge 50, 75, voire une centaine d’accouchements.
La population a, quant à elle, bien conscience de ce problème de santé publique et de plus en plus d’initiatives se développent notamment pour améliorer les conditions d’hygiène et sensibiliser à l’importance du suivi gynécologique et de grossesse.
Y a-t-il des actions déjà lancées pour cette association née en 2018 ?
Je travaille en collaboration avec une start-up camerounaise qui a lancé une application mobile sur le sujet. Elle permet aux femmes de leur offrir un guide de suivi de grossesse à distance, les prévenir par texto de leurs prochains rendez-vous de consultations prénatales ou bien d’échographie.
D'autres actions seront tournées vers la formation des sages-femmes et on travaille aussi pour développer des campagnes de sensibilisation plus spécifiques en 2019.
Si des sages-femmes souhaitent s’impliquer, que leur diriez-vous ?
Toute sollicitation est positive, si l’on souhaite s’impliquer dans des actions sur le terrain, que les sages-femmes n’hésitent pas à nous contacter via le formulaire du site. Il est aussi possible de devenir membre de l’association en souscrivant à l’adhésion et participer au développement de "Parfait pour Jaden".
Sources :
minsante.gov.cm
cameroun.unfpa.org
afro.who.int/fr
aho.afro.who.int
lemonde.fr
carefrance.org