Camille Bramard, sage-femme française, s’est lancée dans une nouvelle expérience américaine. Elle nous explique son parcours.
Pouvez-vous nous décrire votre parcours professionnel ?
J’ai un parcours professionnel qui a commencé de façon assez classique. Diplômée de l’école de sages-femmes de Grenoble en 2011, j’ai ensuite travaillé à l’hôpital de Chambéry, et ce, jusqu’à la fin de l’année 2014.
Durant cette période, je suis passée par tous les services : les plus « classiques », comme la salle de naissance, les urgences gynécologiques, les suites de couches, et le service des grossesses pathologiques, mais j’ai également eu l’opportunité de travailler en néonatologie et en unité kangourou pendant plus d’un an.
De façon concomitante, mon époux, qui est chercheur en neurobiologie, a trouvé un poste de post-doctorant à San Diego, aux Etats-Unis. Voilà pourquoi nous avons quitté nos montagnes savoyardes pour les plages californiennes !
Déposer ses valises à San Diego quand on est sage-femme, des options pour exercer ?
En arrivant ici, j’ai essayé de me renseigner sur les démarches à effectuer pour obtenir une équivalence de mon diplôme français et exercer en tant que sage-femme mais en réalité, c’est assez compliqué.
Tout d’abord, il faut réaliser que le système américain est complètement différent du nôtre. En France, pour devenir sage-femme, le cursus est quasiment unique et uniformisé, à la suite duquel on obtient un diplôme d’Etat qui nous permet d’exercer partout en France (et en Europe). Alors qu’aux Etats-Unis, c’est quasiment l’inverse : il existe bien un examen national commun mais ensuite, au sein de chaque Etat, les règles qui régissent l’accès à la profession sont différentes.
Pour entrer dans une école de sages-femmes, il faut parfois être déjà infirmière, alors que pour certains Etats ce n’est pas obligatoire, ensuite le diplôme obtenu en fin de cursus peut être un master, mais aussi certaines fois un doctorat en maïeutique. Et enfin, ce diplôme obtenu n’est pas forcement valable dans tous les Etats, à savoir, qu’une sage-femme américaine qui souhaite exercer dans un Etat différent de celui qui lui a délivré son diplôme peut se voir refuser ce droit si celui-ci ne rempli pas les exigences du nouvel Etat...
Quelles sont les démarches ?
Les sages-femmes étrangères souhaitant exercer aux Etats-Unis doivent s’adresser à des organismes qui s’occupent de déterminer si le diplôme étranger obtenu est valable et si des études complémentaires sont nécessaires pour correspondre aux exigences de l’Etat en question.
Si leur diplôme est accepté, elles doivent également passer l’examen national. Toutes ces démarches sont longues, compliquées et souvent coûteuses, surtout s’il est nécessaire de compléter sa formation ici, un semestre à l’université coûte environ 10000€ !
Quelles sont les compétences des sages-femmes aux Etats-Unis ?
En ce qui concerne les compétences des sages-femmes en elle-même, elles sont relativement semblables aux nôtres (suivi gynécologique de la femme tout au long de la vie, contraception, soins prénataux, suivi de travail, accouchement, soins aux nouveau-nés, éducation sexuelle…) mais leur mode d’exercice varie un peu.
En effet, bien que les sages-femmes ici peuvent exercer partout (cabinets privés, hôpitaux, maisons de naissance et à domicile), elles ne pratiquent que très rarement elle-même l’accouchement en milieu hospitalier, plutôt réservé aux médecins. On peut tout de même noter le développement plus important des maisons de naissances, avec 34 maisons de naissance en Californie, et de l’accouchement à domicile. Ils représentent à eux deux environ 5% des accouchements en Californie.
S’installer aux Etats-Unis, n’est donc pas très évident pour officier en tant que sage-femme… Avez-vous décidé d'obtenir l'équivalence?
Pour ma part, j’ai fait le choix de laisser de côté, le temps de notre hiatus américain, le métier de sage-femme, et de m’essayer à autre chose.
Depuis Septembre 2015, j’ai intégré une école française ici, à San Diego, où je travaille en tant qu’assistante dans une classe d’enfants de deux ans. Mon rôle s’apparente à celui d’une assistante maternelle en France, j’assiste la maîtresse dans tous les aspects de vie en classe. Et je dois dire que j’adore !
Bien sûr, c’est à mille lieux de ce que je m’étais imaginé en entrant à l'école de sages-femmes, mais justement, toute cette expérience me fait réaliser que j’aime l’idée que nous ne sommes pas uniquement déterminés par les études que nous choisissons, mais que la vie et nos choix nous réservent de belles surprises…
Après, au fond de moi, je reste malgré tout une sage-femme, fière de ma profession et de ce qu’elle apporte dans la vie des gens.