L’endométriose est une pathologie gynécologique fréquente touchant 10 % des femmes en âge de procréer. Si son diagnostic est avant tout clinique, l’imagerie, dont l’IRM pelvienne, peut venir compléter celui-ci en cas de suspicion d’endométriose sévère.
Faisons le point sur cet examen avec Dr Mikhael Benjoar, radiologue spécialisé en imagerie de la femme (Paris).
IRM pelvienne : Quand est-elle indiquée ?
Les recommandations de la HAS considèrent l’IRM pelvienne comme un examen de deuxième intention. Elle doit être réalisée après un examen clinique et une échographie pelvienne. Elle est indiquée en cas de forte suspicion d’atteinte d'endométriose profonde et dans le bilan pré opératoire. Il est important d’orienter la patiente vers un centre référent dans cette pathologie, car comme le souligne la HAS, son interprétation relève d’un radiologue expert.
Quelles informations donner aux patientes ?
L’IRM est un examen bien toléré et non invasif. Néanmoins, pour les patientes claustrophobes, elle reste un obstacle important.
Les patientes doivent être informées:
Qu’un jeûne de 4 heures est nécessaire
Qu’un lavement rectal 2h avant l’examen est systématiquement prescrit pour permettre une analyse performante de la paroi recto sigmoïdienne. Par contre, la réalisation d’une opacification rectale ou vaginale au gel
Seule une injection sous cutanée d’antipéristaltique type glucagon est réalisée 10 minutes avant l’examen d’échographie n’est pas systématique (l’injection intra veineuse de gadolinium n’a elle aussi pas montré de supériorité1)
Sur quoi repose son analyse ?
L’analyse repose sur les séquences T2 sans saturation de graisse. Des séquences 3D T2 permettant des reconstructions dans tous les plans de l’espace. Les séquences T1 sans et avec saturation de la graisse permettent la recherche et la caractérisation des implants hémorragiques (endométriomes et implants superficiels).
Comment explorer les différents types d’atteintes endométriosiques ?
- Endométriose ovarienne
Les endométriomes sont une localisation fréquente d’endométriose, ils sont facilement identifiables en IRM sur les séquences T1. Ils apparaissent en Hyper signal T1 supérieur à la graisse sur la séquence T1 sans saturation de graisse, cet hyper signal persiste après la suppression de signal graisseux. En T2 l’endométriome se caractérise par un « shading » c’est à dire une chute de signal Variable qui peut aller d’un discret hypo signal T2 à un vide de signal complet. Les endométriomes sont souvent bilatéraux et multiples.
L’atteinte tubaire va se caractériser par des hématosalpinx endométriosiques qui sont des formations tubulées présentant des caractéristiques de signal semblables aux endométriomes. La différenciation entre endométriomes et hématosalpinx est souvent difficile mais indispensable dans le cadre des prises en charge en PMA.
Figure 1 : Aspect Typique d’un endométriome ovarien droit - Hyper signal T1 spontané supérieur à la graisse
- Endométriose sous péritonéale postérieure :
L’IRM est très performante pour la détection et la cartographie précise des lésions de l’endométriose profonde. Elle se caractérise par la présence de fibrose rétractile qui se caractérise par un franc hyposignal T2 et T1. La présence de spots en hypersignal T1 FAT SAT correspond à des implants hémorragiques d’endométriose superficielle surajoutée. La localisation la plus fréquente se situe sur les ligaments utérosacrés et le torus utérinum.
Une atteinte sera affirmée par un épaississement focal supérieur à 3mm d’épaisseur, la présence de spicules ou d’implants hémorragiques. La recherche de cette atteinte est facilitée par la réalisation d’une séquence spécifique en T2 coupes fines haute résolution de 3mm d’épaisseur parallèle au plan de ces ligaments. La sensibilité et la spécificité sont évaluées respectivement à 84 et 89%, supérieurs à l’échographie endovaginale et à l’écho endoscopie rectale.
L’aspect classique est celui de « moustache retro cervicale » avec la visualisation juste en arrière du col, d’un épaississement spiculé du torus et de l’origine des deux ligaments utérosacrés.
Figure 2 : Exemples d’épaississement du torus et des ligaments utéros sacrés
Cette atteinte fibrosante s’accompagne fréquemment d’un phénomène rétractile avec attraction des ovaires en arrière et phénomène de « kissing ovaries »
L’atteinte va potentiellement s’étendre vers l’arrière et la charnière sigmoïdienne. Différents types d’atteinte sont possibles allant de la simple adhérence à une atteinte de la musculeuse digestive et même potentiellement de la sous muqueuse.
Figure 3 : Atteintes digestive en T2 chez deux patientes différentes - Atteinte extensive en coupes sagittales T2 avec atteinte allant jusqu’à la sous muqueuse (flèche blanche)
L’atteinte digestive va être affirmée en IRM par la présence de nodule en franc hyposignal T2 dans la musculeuse digestive.
L’IRM permet aussi de détecter les lésions recto sigmoïdiennes multi focales, notamment en cas de dolicho sigmoïde avec une deuxième atteinte en regard de la fossette ovarienne gauche
L’atteinte peut aussi s’étendre vers le bas en atteignant le cul de sac vaginal postérieur ; son identification en imagerie est difficile, contrairement à son évaluation clinique aisée. En IRM cette atteinte va se caractériser par un épaississement du cul de sac vaginal postérieur en hyposignal T2 et par la présence de spots hémorragiques en Hypersinal T1 après saturation de la graisse.
Figure 4 : Exemples d’atteinte du cul de sac vaginal postérieur - Atteinte spiculée du cul de sac vaginal postérieur en T2 coupes fines
Figure 5: Atteinte centrée sur le cul de sac vésico utérin - Nodule spiculé centré sur le cul de sac vésico utérin en coupes axiales T2 (flèche noire)
- Endométriose sous péritonéale antérieure
Les localisations antérieures sont plus rares (5 à 10%). Elles vont se définir par une infiltration du cul de sac vésico utérin avec atteinte plus ou moins importante de la paroi vésicale. Elle sera affirmée par la présence d’un nodule en hyposignal T2 dans cette paroi (fig 5). Les atteintes antérieures sont fréquemment le siège d’implants hémorragiques en hypersignal T1 .
- Endométriose latérale :
Les atteintes extensives d’endométriose vont s’étendre aux paramètres et aux parois pelviennes latérales. Ces atteintes latérales peuvent se compliquer de lésions urétérales pouvant entraîner une dilatation des cavités pyelo calicielles. C’est pour cette raison que toute IRM doit comporter une exploration rénale.
- Formes rares :
D’autres atteintes plus rares et plus difficiles à explorer peuvent bénéficier d’une IRM. L’atteinte du bas fond caecale et de la dernière anse iléale.
L’atteinte de la paroi abdominale antérieure peut donner des aspects de pseudo tumeur des parties molles avec des masses spiculées en franc hyposignal T2 pouvant être le siège d’implants hémorragiques.
L’atteinte diaphragmatique ne sera recherchée qu’en cas de douleurs de l’hypochondre droit cataménial ou en cas d’antécédents de pneumothorax cataménial. La visualisation d’implants hémorragiques diaphragmatiques permet d’affirmer le diagnostic.
En conclusion …
L’IRM est aujourd’hui un outil incontournable du diagnostic et du bilan d’extension de la maladie endométriosique. Elle permet au clinicien d’évaluer avec précision les localisations et l’extension de la maladie afin de déterminer avec précision le traitement optimal chirurgical ou médical pour soulager au mieux les patientes en termes de douleurs, de qualité de vie ou de fertilité.
Bibliographie :
1. Bazot, M., Gasner, A., Lafont, C., Ballester, M. & Daraï, E. Deep pelvic endometriosis: limited additional diagnostic value of postcontrast in comparison with conventional MR images. Eur. J. Radiol.80, e331-339 (2011).
2. Bazot, M. et al. Comparison of 3D and 2D FSE T2-weighted MRI in the diagnosis of deep pelvic endometriosis: preliminary results. Clin. Radiol.68, 47–54 (2013).
3. al, B. M., et. Value of thin-section oblique axial T2-weighted magnetic resonance images to assess uterosacral ligament endometriosis. - PubMed - NCBI. Available at: https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/21149318. (Accessed: 27th February 2017)
4. Bazot, M. et al. Diagnostic accuracy of physical examination, transvaginal sonography, rectal endoscopic sonography, and magnetic resonance imaging to diagnose deep infiltrating endometriosis. Fertil. Steril.92, 1825–1833 (2009).
5. Bazot, M. et al. The value of MRI in assessing parametrial involvement in endometriosis. Hum. Reprod. Oxf. Engl.27, 2352–2358 (2012).