Ce n’est pas banal un tel projet pour une étudiante dans le design, pourquoi cette idée ?

En effet, j’avais carte blanche pour mon projet alors j’ai souhaité m’orienter vers l’innovation sociale. Il est vrai que je suis intéressée par le féminisme, j’ai aussi découvert avec le blog de Martin Winckler que l’on pouvait remettre en question l’autorité médicale. Il existe un enjeu important à s’informer par soi-même. Ce projet a alors germé. Par la suite, j’ai constaté que les objets pédagogiques en volume manquaient. On trouve effectivement des planches anatomiques, mais elles ne sont pas compréhensibles par tout le monde.

Comment avez-vous conceptualisé le projet ?
 
 

J’ai d’abord initié des recherches sur les outils existants pour expliquer le corps. J’ai analysé des outils très anciens comme les machines de Madame Du Coudray, à d’autres contemporains, les émissions comme « C’est par sorcier », des maquettes ou bien des dessins animés. Je voulais sortir de cette représentation trop froide, trop médicale et me tourner vers la sensorialité et l’expressivité. La manipulation des objets en volume est importante pour comprendre, tout comme le discours, à travers la métaphore ou la fiction par exemple.Ils aident à dépasser la gêne et à ne pas parler frontalement de sexe. Avec ce kit, j’aimerais que les femmes puissent mettre des mots sur le sexe féminin tout en retenant la fonction de chaque organe.

Des professionnels vous ont-ils aidé dans cette démarche ?
 

J’ai rencontré une conseillère de planning familial, une sage-femme du planning familial d’Evry, une socio-sexologue du département de l’Essonne ainsi que deux professeurs de sciences de la vie et de la terre. Ils ont testé les premières maquettes et ils m’ont aidé à affiner et à parvenir jusqu’au prototype.
 

Que va-t-on trouver dans ce kit d’éducation sexuelle ?
 

Le prototype est composé d’une mallette avec des objets en textile ou des objets détournés représentant les différentes parties de l’appareil génital féminin. Chaque organe est représenté par analogie fonctionnelle. Par exemple, le périnée est fabriqué avec des cordes d’escalade, cela évoque la force des muscles ; le col de l’utérus avec 3 types de  joints, pour expliquer son ouverture cyclique.

Ces objets se construisent aisément grâce à des patrons de couture ou bien avec des objets détournés. Les pays les plus pauvres pourront les reproduire avec du matériel familier et à moindre coût.

Le kit sera également accompagné d’un site internet ressource, sorte de guide,  pour aider les professionnels  à vulgariser le discours et aussi pour apporter des ressources au public. Il est très probable que je développe un support papier pour accompagner le kit, d’après les retours que l’on m’a faits, il serait important de pouvoir laisser un support papier à la personne qui reçoit l’information et ainsi éviter de se remettre devant l’écran ce qui briserait la conversation.

Quelle est la suite de ce projet ?

 

Les professionnels montrent un vrai intérêt pour le projet. Aujourd’hui, Les Parleuses est donc un projet entrepreneurial, je travaille à commercialiser le kit et à diffuser les plans de fabrication en France et à l’international. C’est très compliqué de trouver des financements à ce stade de développement du projet.

Je ne sais pas encore sous quel modèle économique le projet va pouvoir exister, mais j’aimerais par exemple que l’on puisse l’emprunter à la bibliothèque.
Pour le moment, si j’ai toujours bien été accueillie par les professionnels, ce qui me manque c’est le retour du public. Je dois m’assurer que le kit soit compréhensible de tous, que tout le monde puisse se l’approprier et je dois aussi évaluer la réaction des enfants. C’est pourquoi je vais lancer prochainement une phase de test sur le terrain.
Une série limitée de kits devrait être commercialisée à l’automne 2018. Je ne suis pas en mesure de communiquer sur son prix pour l’instant.

 

Pour suivre la communauté « Les parleuses » développée autour de ce projet : lesparleuses.fr
et sur Facebook, Twitter et Instagram @KitLesParleuses

© Fanny Prudhomme - Les Parleuses. 

*Enquête de 2009 réalisée par la faculté de médecine de Montpellier