Sage-femme libérale à Londres depuis 2012, Caroline Mallard a lancé avec d’autres professionnels de santé le 1er réseau de périnatalité : « Baby & me – London».
Quel est votre parcours ?
Diplômée en 2003 de l’école de sage-femme de Baudelocque, à Paris, j’ai exercé pendant 4 ans au CHV, Centre Hospitalier de Versailles, puis à la maternité de Beaujon.
Pour des raisons familiales, j’ai déménagé à Londres en 2011. Il fallait alors régulariser ma situation auprès du Nursing & Midwifery council (équivalent du Conseil national de l’Ordre des sages-femmes français) pour exercer. Cela a pris une année. Une fois le diplôme reconnu, vers quelle voie s’orienter : sage-femme à l’hôpital ou bien en libéral ?
Ici, les sages-femmes officient majoritairement dans les hôpitaux, l’activité libérale est assez rare. Pour autant, j’ai tout de même décidé de sauter le pas et d’ouvrir mon cabinet.
Maintenant, vous exercez avec plusieurs praticiens et proposez un accompagnement global aux patientes. Pouvez-vous nous en dire plus ?
Entreprendre une activité libérale dans une autre ville et surtout lorsque ce n’est pas la « norme » n’a pas été facile. Mais j’avais l’idée de rejoindre d’autres praticiens afin de travailler en équipe et de pouvoir proposer un accompagnement global aux patientes.
J’ai d’abord rencontré une psychologue française, puis une sage-femme française tout juste arrivée à Londres. En quelques mois, on a créé un réseau « Baby & me – London », le premier réseau de périnatalité bilingue, anglais-français, à Londres. Aujourd’hui, ce sont ostéopathe, sages-femmes, médecin, homéopathe, sophrologue, praticien en haptonomie, etc, qui accompagnent les patientes depuis le désir de grossesse, pendant la grossesse, jusqu’au post-partum et les premiers mois de l’enfant.
En Angleterre, les sages-femmes du National Health Service (équivalent des hôpitaux en France) proposent un accompagnement pendant la grossesse et même l’accouchement à domicile. Alors qu’est-ce que ce réseau offre de plus aux patientes ?
Le suivi de grossesse est bien différent par rapport à la France. La fréquence des consultations obstétricales pour les grossesses à bas risque est moindre qu’en France, on ne réalise pas de toucher vaginal durant la grossesse, la surveillance fœtale est également moins poussée (pas de sérologie toxoplasmose, 2 échographies obstétricales, pas de surveillance de fin de grossesse…). La préparation à la naissance proposée par l’hôpital correspond à une séance en groupe de 2 heures, où la sage-femme aborde tous les sujets (a priori) et la rééducation périnéale n’est prescrite aux patientes que si leur accouchement a été traumatique (déchirure du 3ème degré).
Certaines patientes et notamment les expatriées sont troublées par ces contrastes, des femmes ne sont pas rassurées et préfèrent compléter leur suivi de grossesse. Nous leur proposons donc un accompagnement pluridisciplinaire et personnalisé pour que la grossesse et l’après soient vécus le plus sereinement possible.
Grâce aux réseaux sociaux, de plus en plus de patientes intègrent « Baby & Me- London » pour leur suivi et ce sont essentiellement des Françaises. C’est également un atout pour ces femmes, loin de leur famille et de leurs amis, plus exposées à la dépression du post-partum…
Vous arrive-t-il de travailler avec les sages-femmes du NHS ?
Les sages-femmes du NHS sont très nombreuses, et finalement on ne réfère que très rarement les patientes à l’hôpital. Dans certains cas, en France, j’aurai orienté, mais ici, de par les différences de fonctionnement, ce n’est pas possible. Je pense à une patiente qui présentait un col raccourci, asymptomatique, avant terme pour laquelle j’aurai demandé une échographie du col de l'utérus et un monitoring. Mais ici, on ne pratique pas ces examens dans cette situation. Au final, pour cette patiente le repos a été suffisant et elle a accouché à terme...
Sage-femme libérale à Londres, votre ressenti ?
Finalement, mon mode d’exercice est assez similaire à celui des sages-femmes libérales françaises, sauf qu’ici les sages-femmes ne sont pas habilitées à prescrire.
Frustration ? Pas vraiment, puisque beaucoup de médicaments sont en vente libre alors je n’ai pas besoin d’orienter forcément les patientes vers un médecin pour les obtenir.
Malgré tout, les sages-femmes à Londres ont une meilleure reconnaissance et de nombreuses missions leur sont dédiées dans le système hospitalier.