L’endométriose touche 180 millions de femmes dans le monde, dont et 20 à 50% de femmes infertiles. Une fois le diagnostic posé, ces femmes vont faire face à une douleur autant physique que psychologique.
Déborah Schouhmann-Antonio, thérapeute (couple, familial, sexothérapie, périnatalité), nous partage ses réflexions sur la pathologie.
L’endométriose est une affection gynécologique touchant de plus en plus de femmes, et qui se matérialise par la présence de muqueuse utérine en dehors de la cavité utérine.
Les symptômes peuvent être entre autres des douleurs lors des règles voir hors période de règle, des douleurs lors des rapports sexuels ou cette maladie peut encore dans certains cas générer de l’infertilité…
Lorsqu’un diagnostic est enfin posé, les patientes vont faire face aux traitements qui doivent leur permettre de réduire leur douleur, ou le cas échéant de pallier à leur infertilité, mais elles vont aussi devoir faire face à la douleur psychologique que crée cette maladie !
L’attente d’un diagnostic
Les femmes souffrant de cette pathologie attendent souvent bien des années (5 ans en moyenne) avant qu’un nom soit posé sur leurs symptômes. Ce qui rend les choses d’autant plus complexes, que pour un certain nombre, elles ont un sentiment que leurs douleurs sont niées, voir minimisées par le corps médical ainsi que par leur entourage. Il faut pour certaines batailler avec les médecins pour faire entendre leur douleur. Ce qui procure chez les femmes le sentiment d’être incomprises.
Ce besoin de reconnaissance est important, voire essentiel. « Non je ne suis pas folle, non je ne rêve pas…j’ai bien quelque chose, ce ne sont pas des douleurs de bonne femmes mais bien une maladie ! » C’est un parcours bien long et douloureux que d’être reconnue comme « malade ».
Vivre quotidiennement avec l’endométriose
L’endométriose pourrait être considérée comme un handicap invisible ! Les femmes qui souffrent de cette maladie ne sont pas extérieurement marquées, c’est sans doute pourquoi leur entourage y fait souvent abstraction. Pour autant les douleurs sont bien réelles et la maladie génère un mode de vie qui doit s’adapter à cette pathologie.
Les femmes expliquent souvent qu’elles sont soumises au rythme de leur maladie. « Je dois parfois renoncer à certaines sorties, juste à cause de la douleur qui est trop forte, et cela m’oblige à vivre sans légèreté ».
Les femmes parlent également d’isolement social, ce ne sont pas elles qui sont maîtres du jeu mais la maladie, ce qui les oblige parfois à annuler ou différer certaines activités, car il est difficile d’expliquer à leur entourage ce que génère cette maladie.
Evidemment cela à également un impact sur leur vie professionnelle. Certains jours la souffrance ne leur permet pas de pouvoir se rendre à leur travail. Comment expliquer à un employeur ce qui les cloue au lit ? Parler des règles est encore un sujet tabou et si intime.
Enfin, la vie intime est également impactée, puisque l’endométriose peut donner des douleurs lors des rapports sexuels, rendant ces derniers peu agréables, voire créer un moment de tension dans le couple. C’est la raison pour laquelle il n’est pas rare de constater un manque d’énergie voire des symptômes dépressifs apparaître chez les patientes.
Il s’offre alors plusieurs options pour les patientes : la prise d'un traitement anti-douleur et/ou de la pilule afin de réduire les douleurs. Dans les cas de trop fortes douleurs, c’est alors l’intervention chirurgicale qui peut-être proposée !
Dans le cas de la prise d’hormones, il faut alors vivre avec les effets secondaires des médicaments qui parfois perturbent le fonctionnement de la patiente sans pour autant supprimer la douleur. Ces traitements sont palliatifs et ne « guérissent » pas. Ce qui génère chez les femmes l’idée du temps suspendu, de la maladie qui guette et qui va revenir le jour de l’arrêt de ces médicaments.
Dans le cas de l’intervention, c’est avec une grande appréhension mêlée d’un indicible espoir que les femmes vivent cette opération. C’est une chirurgie parfois lourde, qui demande à la patiente encore des efforts pour qu’elle dompte sa douleur.
Ces interventions sont très bénéfiques pour les patientes, malgré la complexité médicale qu’elles demandent parfois, notamment quand l’endométriose s’est profondément installée sur les organes voisins. Mais la contrepartie pour les patientes est l’idée que l’épée Damoclès est toujours présente au dessus de leur tête, car l’endométriose n’est pas éradiquée, mais juste effacée pour un moment.
Les patientes vivent donc dans l’idée de l’urgence, de l’après, et scrutent le retour des douleurs, pour certaines et pour d’autres l’idée d’urgence devient obsédante pour faire un bébé avant que l’endométriose ne reprennent ses droits !
Le désir d’enfant et l’endométriose
Près de la moitié des femmes souffrant d’endométriose sont sujettes à des problèmes pour concevoir un enfant. En effet, la PMA (Procréation Médicalement Assistée) est une bonne option afin de pallier à cette problématique, en revanche c’est la double peine pour des femmes déjà en souffrance. La région pelvienne étant déjà une zone décrite comme un lieu de souffrance pour beaucoup, elle devient également le lieu d’un autre type de problème celui de l’infertilité !
Après la souffrance quotidienne, les patientes vont alors être confrontées à une souffrance du désir d’enfant.
Le parcours de PMA est souvent long et délicat pour les femmes, là c’est une continuité dans la douleur qui est de plus pénalisante pour arriver à l’enfant ! Il est à noter qu’un certain nombre de femmes disent ne plus voir les douleurs liées à leur endométriose être plus fortes lors des traitements de stimulations.
La reconnaissance de cette souffrance est essentielle dans le processus psychologique des patientes. Rappelons qu’écouter ces femmes est un premier pas dans leur mieux être !