Comme le yoga qu’elle pratique, « yoga adapté », Nina Guéneau, a su s’adapter aux évènements de la vie. Rencontre avec une sage-femme qui ne se laisse pas abattre !
Votre parcours ?
J’ai obtenu mon diplôme de sage-femme à la faculté droit et santé de Lille en 2009. À la fin de mon cursus, nous étions près de la moitié de la promotion à ne pas trouver d’emploi. Alors, j’ai débuté en faisant fonction d’infirmière en gériatrie puis en unité de soins intensifs en néonatologie, pendant 4 mois.
Ensuite, j’ai fait quelques gardes dans une maternité de type 3 à Calais pour trouver enfin poste au CHRU Jeanne de Flandre.
Qu'est-ce qui vous a interpellé durant votre expérience hospitalière ?
En fait déjà pendant les stages infirmiers, je trouvais qu’énormément de stress s’imposait au soignant, ce stress que je retrouvais en exerçant dans une grande maternité de niveau 3.
Finalement,on ne dispose pas d’outils pour nous ménager et pour offrir une plus grande disponibilité aux patientes, c’est pour cette raison que j’ai souhaité entreprendre un diplôme universitaire sur la gestion du stress et de l’anxiété.
Même si cette idée était bien accueillie par mes supérieurs, cette formation ne faisait pas partie des priorités de l’établissement, j’ai tout de même suivi cet objectif, ce ne pouvait qu’être un atout pour moi et les patientes !
De là, j’ai enchaîné avec un diplôme d’acupuncture et une formation en micronutrition, dans une quête d’un accompagnement moins médicalisé à proposer aux patientes.
Et le yoga, dans tout ça ?
Je suivais déjà des cours de yoga avant, c’était une pratique un peu plus personnelle, pour m’aider à créer de la distance avec le travail. Et surtout, parce je participais à de nombreuses courses à pied, c'était une bonne discipline pour m’étirer, pour récupérer sans trop souffrir de courbatures.
Puis, enceinte, j’ai fait une menace d'accouchement prématuré, j’ai continué la pratique avec une professeure qui m’accompagnait autrement, elle m’a fait découvrir une autre dimension du yoga.
Puis des évènements ont comme boulversé votre vie?
En 2014, je tombe malade, j’étais épuisée, ma colonne vertébrale me faisait atrocement souffrir, j’ai attrapé une grippe en plein mois je juillet… tout s’écoule, on m’a diagnostiqué une maladie chronique. Je ne peux plus rien faire, je suis couchée toute la journée… Et là, je suis en colère contre mon corps, contre le yoga car je suis incapable de réaliser de simples postures. Paradoxalement, de penser au yoga, à l’enchaînement de postures apaise mon mental et me suggère bizarrement des recettes de cuisine….
Est-ce cela vous a incité à reprendre la pratique, malgré tout ?
Oui, je me suis mise à chercher une salle de yoga. J’enchaîne les cours, mais j’ai mal, je suis en poussée, je pleure, on me demande de ne pas revenir… jusqu’au jour où je trouve une professeure à l’écoute. Je lui ai alors expliqué ce dont je souffrais et elle m’a encouragée à commencer une formation de professeure de yoga.
Inattendu, assez fou, elle m’a aidée à suivre les cours alors que je ne pouvais pas bouger ! J'entame ainsi dans un état de santé dégradé, ma première formation sur 4 ans pour être professeure de yoga traditionnel dans un but personnel: la gestion de mes douleurs chroniques au quotidien.
J’ai ensuite souhaité approfondir mes connaissances, ma pratique en m’inscrivant au diplôme universitaire de yoga adapté.Là aussi, le chemin fut semé d’embûches : on m’a diagnostiqué une endométriose, on m’a opérée, transfusée, j’ai perdu 11 kg… mais j’ai pu malgré tout valider le diplôme avec mention très bien.
Une sacrée victoire ! Vous ne pouvez pas vous arrêter en si bon chemin !
C'est vrai, qui se poursuit actuellement avec :
ma troisième formation de yoga "yogathérapie" à la faculté de Paris Diderot
la création d'AYA Association de Yoga Adapté qui réunit les diplômés du DU de yoga adapté. Une initiative que j'ai eu en 2017 et avec laquelle j'ai chapeauté l'organisation du premier festival universitaire de yoga en France avec 30 ateliers conférences adaptés aux besoins des usagers autour des outils du yoga. L'université des sports de Lille qui dirige le DU de yoga adapté a donné son accord pour la 2ème édition en 2019.
une association yoga et douleurs chroniquesafin d'échanger et de partager avec des personnes dans mon cas
Et je propose aussi des cours de yoga pré et postnataux
Avez-vous encore d’autres projets ?
Je suis rentrée dans le comité de lutte contre la douleur au sein de l’hôpital dans lequel j’exerce. Je souhaiterais voir se développer des unités de médecine complémentaire dans les hôpitaux, où les patients se trouveraient acteurs de leurs soins et ce qui répondrait aussi aux prérogatives des établissements de santé, d’un point de vue économie de santé.
Mon projet de recherche est validé est validé par le CHRU de Lille, nous l’avons déposé en régional. Il est centré sur les femmes souffrant d’endométriose. « L’utérus » est le cœur de métier des sages-femmes, on a accès à la gynécologie, on peut participer au dépistage et à l’amélioration de la qualité de vie de ces femmes. Nous avons toute notre place !
C’est pourquoi je travaille actuellement avec des ingénieurs de recherche pour prouver l’efficacité du yoga .C’est un début, j’espère que ce projet se concrétisera et s’étendra pour d’autres malades !