Dans 20 ans, comment voyez-vous évoluer la profession? Marie-Josée Boyer, sage-femme à Paris nous donne son point de vue.
Des sages-femmes moins nombreuses mi-humains, mi-robots, en manque de temps
En 30 ans de carrière, j'ai assisté à des changements pas toujours positifs...
Alors que les technologies ne cessent d'évoluer, les liens humains disparaissent. Le temps manque et pourtant les exigences de la direction des hôpitaux et celles des patientes augmentent. Avant les patientes vivaient le moment présent : celui de la naissance de leur bébé.Aujourd'hui, on entend sonneries de portable, le clic clac des touches d'ordinateur. C'est l'ère de l'innovation technologique! Peut-être qu'attendre son enfant sera devenu trop lent et qu'on aura encore moins le temps...
Dans 20 ans il n'y aura pas 20% de césariennes mais peut-être le double! La maitrise du temps et celle de l'argent ne laissera pas de place à l'imprévu, à la spontanéité, à la nature. L’accouchement sera prévu tel jour à telle heure, tout sera choisi. Puisque la santé coûte chère, Les usines à bébés ne cesseront d'augmenter avec un minimum de personnel.
Les sages-femmes, des super techniciennes et techniciens, seront devant les écrans d'ordinateurs pour surveiller les monitoring et répondre aux questions des patientes et peut-être qu'un logiciel ultra sophistiqué nous permettra de connaitre la dilatation du col de la patiente et la présentation du bébé…
Les couloirs des services des maternités seront déshumanisés, peuplés seulement d'écrans d'ordinateur. La surveillance sera plus performante avec des sages-femmes moins nombreuses, mi-humains et mi-robots en manque de temps.Les études de sages-femmes n'auront pas de spécificité, tous dans un bloc commun a apprendre les nouvelles technologies à la place de la pratique clinique. Les séjours des patientes en maternité s'écourteront davantage alors que les sages-femmes seront moins nombreuses, le suivi sera peut-être devenu un luxe, qui sait ?!